Shigetsuke tapote sa plume contre son carnet, il barre le mot "racine". Il réfléchit quel mot pourra apporter plus de poésie, plus de sens dans son œuvre. Après tout, c'est ça le rôle d'un Shiningami selon lui, donner du sens à une âme égarée, veiller à ce qu'elle trouve son chemin, favoriser l'équilibre. Shigetsuke est à l'antipode des autres Shiningami de sa division. La première division a la réputation d'avoir en ses rangs des shiningamisplutôt tirs aux flancs. Lui, est plus posé, plus empathique et romantique. Assis au pied d'un arbre, des feuilles renvoient de l'ombre sur son visage, afin de le protéger du soleil. Il savoure cette paix retrouvée. Un calme. Un moment où l'on ne se soucie pas du futur, un moment où l'on vit dans le présent. Comme cela est agréable...

Mais le calme n'est jamais éternel.
Les hautes voix du Sereitei résonnent, s'agitent. Une mine s'est effondrée dans le monde des hommes. L'impact ? Plusieurs victimes, dont de nombreuses personnes subitement décidées. Shigetsuke savait qu'il est bien plus simple de guider une âme, prête à mourir vers la Soul Society, qu'une âme que se surprend être parti de son enveloppe. Il est dès lors, plus difficile de faire comprendre cette nécessité de partir, d'abandonner ses proches et de rejoindre la Soul Society. Ce sont alors les Shiningami qu'on la charge de veiller à récolter les âmes, comme le ferait un bon ami nous guidant, nous conseillant. Lorsqu'une âme refuse de partir, elle devient alors un monstre, un Yokai.

Comme un bon soldat, Shigetsuke se lève, dépoussière son kimono et range son livre de poésie, délicatement, dans son dos. Maintenant, certains Shiningami se précipitent, rejoingnent leurs postes. Les attentions sont diverses. Même si notre héros, lui préfère, prendre le temps de discourir, d'autres préfèrent recourir directement à leur Zanpakouto réglant le problème sans empathie envers la victime. Gozen toisa un officier qui semblait satisfait du nombreux de victime et de ce que cela pourrait engendrer pour les Shiningamis. De l'exercice. Du bétail. Voilà comment cet homme appréhende les hommes du dessous récemment parti de leur enveloppe.

Habituellement, ce sont les Shiningamis de première division qui sont envoyés en premier sur le lieu d'un drame. Mais au vu de la nécessité d'agir vite, il n'est pas rare que des officiers et Shiningamis d'autres divisions soient également dépêchés. Shigetsuke s'approche de l'officier en question. Peut-être essaye-t-il de le dissuader de l'accompagner ? Même si Gozen est un Shningami poli, il n'hésite pas à parler à ses supérieurs hiérarchiques. Il est d'ailleurs convaincu qu'un bon dialogue peut résoudre de nombreux conflits avant que ceux-ci ne démarrent réellement. N'ayant pas peur de son supérieur, Shigetsuke ouvre la discussion. Son intonation est calme et respectueuse.



Shigetsuke est audacieux. Il avait déjà entendu parler de l'officier, mais il n'est pas improbable que ce renseignement ne soit pas réciproque. Néanmoins, il reste poli et respecte les niveaux hiérarchiques. Après avoir parlé, il s'incline en marque de respect vis-à-vis de l'officier. Il attend la réponse de l'officier.

Karyukai, l’une des provinces du Seireitei. Et comme tout membre de cette grande arme qu’est le Goteijutai, une résidence t’avait été  attribuée dans cette région, en plus de l’appartement de fonction dans les quartiers de la Sixième division. De temps à autre, tu appréciais venir jusqu’ici pour faire une coupure avec les responsabilités qui étaient les tiennes. 

Assieds dans le jardin, une tasse de thé à la main, tout en profitant de la légère brise. Un luxe que tu ne pouvais guère te payer régulièrement avec ton rôle de traqueur. Et bien oui, bien qu’en tant que Parle-Esprits, tu n’avais pas la moindre pitié pour tous ceux qui présentaient un danger pour l’armée, aussi bien Yokais que Shinigamis dissidents. 

Exceptionnellement, aujourd’hui tu leur laissais une journée de répit. Il n’y avait pas de mal à prendre un peu de temps pour soi, n’est-ce pas ? Dans cet instant de quiétude, de nombreux souvenirs jaillirent, te rendant presque nostalgique. L’époque où tu officiais pour le compte de l’Ordre Mnémonique, te semblait si lointain. Un léger sourire en repensant à certains dossiers que tu avais pu traiter par le passé.

Malheureusement, toutes les bonnes ont une fin. L’alerte résonnant dans l'entièreté du Seireitei, venait de rompre avec le calme qui commençait à t’envahir. Avant même de te précipiter sur les lieux, tu eus recours à tes talents dans la détection pour sonder le niveau de danger. Pour le moment, ton radar n’indiquait rien de trop alarmant mais par précaution, il fallait rejoindre cette position. 

C’est donc seulement équipé de ton fidèle Zanpakuto que tu pars dans cette direction. Arrivant à destination, quelques shinigamis se hâtaient, comme pressés d’en découdre avec ladite menace. Des victimes causées par une explosion minière. En effet, s’il n’y avait pas une intervention rapide, ces pauvres âmes pouvaient se transformer en terrible Yokais et si cela devait arriver. Tu ferais pleuvoir ton compagnon, Masayoshi, sur eux. 

Pour le moment spectateur de cette agitation, un individu tout aussi imposant que toi, s’approcha en t’interpellant. 

« Se déplacer pour si peu, dites-vous ? Tout shinigami, quelle que soit sa fonction, doit se tenir prêt à intervenir. Personne ne pourrait prédire avec certitude le déroulement d’une intervention. Il vaut mieux être trop prudent que pas assez. » une réponse calme donnée à cet interlocuteur. 

Il fallait tout de même dire une chose :  ce gaillard venait d’éveiller ta curiosité. 

En le disséquant du regard, l’homme ne semblait pas posséder de “marqueur” pour l’identifier comme étant officier, et cela te mettait sur une piste pour déduire sa position dans l’échelle hiérarchique. 

« Qu’auriez-vous fait à ma place, Kaiin ? Je suis tout ouïe. » 

Il n’y avait pas de bonne ou de mauvaise réponse. Simplement un échange d’opinion et de cette façon cela t’aiderait à cerner ce curieux personnage.

Même si Kichi Yûgo a raison. Un shiningami a un devoir, celui d'intervenir en cas d'alerte. Shigetsuke souhaite rester sur sa position. En tenant tête à l'officier. Lui qui a la réputation d'être intransigeant envers les âmes humaines. Lui qui est né âme. Lui, qui n'a pas connu la vie d'un homme. Il peut aujourd'hui se targuer d'avoir coupé plus de 200 Yokai, alors que Shigesuke essaye d'éviter comme il peut d'en convenir à la lame de son Zanpakuto. Néanmoins, l'officier est également connu pour son sens du devoir et de la justice. Participant activement à l'Axe Justice de l'Ordre, c'est pas moins de 412 inculpations. Shigetsuke, sait que jouer sur la corde émotionnelle n'est pas nécessaire avec ce genre d'officier. Ainsi, sa réponse sera la plus logique. Pragmatique. Laissant peu de chance au doute.

Rouge comme le sang.
Shigetsuke se maitrise. La colère n'a pas sa place dans le dialogue. Après tout il est force tranquille. Il est la roche dans l'Océan. Nul ne peut le déstabiliser. La question de Yûgo est une épreuve. Une subtile question devant laquelle tout novice peut tomber. Nul n'a le droit de remettre en doute la parole d'un officier. Les ordres sont les ordres, la hiérarchie est la hiérarchie. Il fallait la respecter. Shigestuke relève la tête pour regarder son interlocuteur.



Blanc comme les os.
Shigetsuke maitrise ses mouvements. Il reste agenouillé. La tête redressée devant l'officier à qui il fait face. Peut-être aurait-il dû se taire. Shigetsuke poursuit sa pensée.



Rouge comme la solitude... Blanc comme le silence... Shigetsuke Gosen venait de trouver un nouveau poème qu'il s'empresserait de noter dès que sa confrontation verbale avec Kichi Yûgo sera terminée.