Il était revenu au Seireitei pour des raisons administratives. Il n'était que simple membre de division, et voilà que l'on confiait des tâches si ingrates à Noah. Il avait quitté le quartier général de sa division il y a quelques temps désormais. Heureusement, il s'avérait que le quartier général de la cinquième division se trouvait également dans la région du Kantô, tout comme le Seireitei se trouvait à Edo. En tout cas, voilà qu'on retrouvait notre protagoniste de bon matin, comme à son habitude, se baladant au travers d'un des quartiers de la ville.

Première chose étrange à remarquer était l'apparente nonchalance du Shinigami. En général, il prenait toujours du temps pour l'entraînement et la méditation, mais pas aujourd'hui. Noah s'accordait un jour de repos dans son emploi du temps si chargé, et maintenant qu'il se trouvait au sein du Seireitei avec un peu de temps libre avant de retourner dans son quartier général, il comptait bien en profiter un minimum. Surtout en partant du principe qu'il était important, voire nécessaire de toujours être préparé mentalement pour pouvoir évoluer. Il était donc primordial de se vider la tête assez régulièrement, afin de ne pas commencer à voir d'apparaître certains signes de déprime ou d'abandon.

Le Karyūkai était un des lieux, si ce n'est le lieu le plus attractif de la Soul Society. Entre les différentes activités de divertissement, les diverses rencontres que l'on pouvait y faire etc. Il était clair que lorsqu'on était dans ce quartier, on avait plutôt tendance à essayer d'oublier nos problème plutôt que d'en chercher des nouveaux. Dans le cas de Noah, il venait de trouver une place assise au sein de plusieurs rangées de bancs. Les bras croisés, son regard se portait sur la scène se tenant à quelques mètres plus loin devant. Une pièce de théâtre s'apprêtait à commencer, et il ne voulait pas en perde une miette. Il n'y connaissait rien, mais il avait entendu certaines rumeurs concernant une pièce de théâtre narrant une véritable tragédie, et qui avait déjà eu droit à plusieurs représentations au sein du Seireitei. Non loin de lui, une jeune femme au charisme notable qu'il décida d'interroger.



Cette femme paraissait un peu froide de prime abord, mais Noah ne s'en souciait guère. Dans le pire des cas, elle l'ignorerait où l'enverrait bouler. Il restait encore quelques minutes avant le début de la représentation, de quoi tailler bavette avant l'heure fatidique...

Plus souvent qu’autrement, tu te trouves loin du Seireitei. Après tout, membre de la seconde division, tu y passais le plus clair de ton temps, entre les murs de cette pièce qui te servait d’atelier, à vivre d’une passion que tu avais désormais le droit d’explorer. Si souvent brimée lorsque tu étais plus jeune, forcée à une vie dont tu ne voulais, tu comptais bien profiter de cette liberté pour laquelle un prix beaucoup trop cher avait été payé, ne serait-ce que pour que le sacrifice n’ait pas été fait en vain. Il s’agirait sans doute de ton plus grand regret si tu en venais à laisser passer cette chance que ton aînée t’avait offerte et tu ne te le pardonnerais sûrement jamais de ne pas lui faire honneur. Tu te retrouvais donc que très rarement, pour ne pas dire presque jamais au Seireitei, sauf à quelques exceptions.

Comme cette fois-ci, où tu étais justement passée voir ton aînée, cette soeur que tu chérissais tant malgré toute la maladresse que tu pouvais avoir de lui exprimer ce que tu ressentais à son égard. Et plutôt que de partir sitôt ton entrevue avec l’héritière du nom que vous portiez, tu t’étais décidée à t’attarder un peu, à observer toutes ces âmes, shinigamis ou pas, qui croisaient rarement ta route. Tes pas t’avaient mené jusqu’à Karyūkai puis jusqu’à une pièce de théâtre qui devait s’y dérouler, racontant la terrible tragédie de deux samuraï dont la mort avait soldé leur récit que tu connaissais par coeur. Ce n’était pourtant pas ton genre de perdre ainsi ton temps à traîner plus longtemps que supposé ici, au sein de cette région qui n’en était pas vraiment une, se superposant au monde humain qui t’appelait tant. Et pourtant, tu étais là, trouvant tout de même un attrait tout particulier aux arts, à cette passion qui émanait de ceux derrière ces pièces qu’il vous était possible d’observer, qu’il s’agisse d’un spectacle sur scène ou encore d’écrits ou de tableaux.

Ton regard se tourne alors sur celui qui se trouve à tes côtés, sa voix attirant ton attention. - Oui, c’est ce que j’ai cru entendre aussi. Elle a eu assez de succès pour pouvoir continuer ses représentations. Cela t’étonnerait presque, les shinigamis ayant tendance à se lasser rapidement, ne serait-ce que parce que l’éternité pouvait devenir mondain. Mais à croire que des histoires de fratricides captent toujours l’attention. - Elle jouait déjà lorsque j’étais plus jeune. Il y a de ça une centaine d’années, donc, ce que tu tais toutefois, te contentant d’esquisser un petit sourire. - C’est la première fois que vous la voyez ? Pas pour ta part, mais bon, ça ne t’empêcherait pas d’apprécier le spectacle.

Les comédiens se préparaient en coulisses, et les spectateurs prenaient peu à peu place parmi les places assises installées pour l'occasion. Noah n'était pas quelqu'un qui passait beaucoup de son temps à assister, il préférait clairement être actif. S'entraîner, méditer, chasser les Yôkai... Ces activités régulières rythmaient sa vie depuis maintenant de nombreuses années. Cela lui procurait une sensation bizarre que de se retrouver à la place de celui qui n'agissait pas. Pour patienter en attendant le début de la pièce, le shinigami décida de s'intéresser un peu plus à son interlocutrice.  



Réflexion intéressante. Lui qui passait le plus clair de son temps à affûter sa lame,  on ne pouvait pas dire qu'il n'était pas un artiste lui-même. Les samurai étaient les peintres, leur lame était leur pinceau et leur faits d'arme étaient leurs toiles. La métaphore était un peu bancale, mais elle tenait debout malgré tout. Alors que la discussion se poursuivait, les choses commençaient à s'agiter en coulisses. La pièce ne possédait pas de dialogues, et faisait passer tout le récit à travers les actions (et quelques indications d'un narrateur). C'est ce point qui avait attisé la curiosité de Noah, et il était bien curieux de savoir comment tout cela allait se dérouler...

Si cela arriver. Alors que l'espace allouée à la scène était presque remplie mondes, Noah fut interpellé par les gestes amples et stressé d'un individu au loin qui semblait hurler sur son équipe technique. Fronçant les sourcils, il se levait alors et, une fois au niveau de l'agité, tendit l'oreille.



Ceci expliquait toute cette agitation. Celui qui se désignait comme le metteur en scène expliqua brièvement la situation au Shinigami. La pièce connaissait un succès fulgurant avec la reprise de leur tournée, mais aujourd'hui, leurs deux acteurs principaux, ceux qui jouaient les rivaux de la tragédie, n'avaient pas put être présents par empêchement de dernière minute. Seulement, pour les remplacer, il leur fallait au moins deux personnes sachant manier l'épée. Réfléchissant un instant, Noah poussa un bref soupir, et tourna les talons, en direction de la jeune femme à qui il parlait.

Il avait bien raison, il ne servait à rien de trop travailler et de s’épuiser inutilement. Prendre un peu de temps pour soi, un peu de repos, ce n’était jamais quelque chose de mal. Du moins, pas à tes yeux. Ce qui pouvait en surprendre plus d’un, compte tenu que tu étais de nature assez rigide, dure avec toi-même et toujours en quête de l’excellence, cependant, toi qui n’avais jamais eu pression du temps sur tes épaules, toi qui vivais depuis plus d’une centaine d’années dans ce monde se superposant à celui des humains, le temps n’avait pas vraiment son importance. Tu le voyais s’écouler sans crainte, sachant pertinemment que tu n’étais pas vraiment affectée par ce dernier, que l’éternité n’était pas si loin que ça.

- Je peux vous en conseiller quelques unes même si je ne les connais pas toutes. Il faudrait juste savoir ce que vous aimez… Faisant mine de réfléchir avant de sortir un cahier de note de ton sac. Tu te retrouves alors à y inscrire quelques noms de pièces de théâtre, toutes aussi intéressantes qu’elles étaient différentes, celles qui avaient su capter ton attention, qui avaient su faire arrêter le temps un bref instant. Tu n’as toutefois pas la chance de lui donner le morceau de papier qui se trouve entre tes mains qu’il se lève pour aller ailleurs, ce qui te fait froncer des sourcils alors que tu le suis du regard. Il y avait de l’agitation du côté de l’équipe technique et tu te demandais donc la raison de tout ça sans pour autant vraiment chercher à en savoir plus. Surtout que, finalement, la réponse vint à toi alors qu’il rebroussait chemin pour une question qui, de une, était assez surprenante, et de l’autre, presque gênante pour toi qui avait ce petit côté timide, peut-être même un peu trop coincé. - Une carrière de comédienne ? Comment ça ? Et dire que ton seul objectif était de, comme lui, te reposer un peu avant de faire le chemin retour jusqu’à ta division.

Tu sembles hésitante. - Pourquoi ça ? Il leur manque des acteurs ? Quelques personnages secondaires ? Tu te dis que tu pourrais peut-être être présente sur scène comme de toute façon tu n’aurais rien à dire, si c’était pour te tenir derrière les acteurs principaux, ceux sur qui l’attention se porterait. - Vous avez déjà fait ça ? Presque surprise compte tenu qu’il ne te semblait pas être un grand connaisseur d’art, qu’il n’avait jamais vu cette pièce non plus.

Jamais Noah n'aurait cru un jour se lancer dans la comédie. Le fait de jouer un rôle autre que le sien, cela devait être assez particulier. Le Shinigami de la Gobantai ne réfléchissait que très peu sur sa manière d'agir et sur la façon dont les autres le percevait. Pourtant, c'était là que se trouvait tout l'intérêt théâtrale. Parmi les plus grands acteurs de notre temps, peu d'entre eux parvenaient en réalité à si bien gérer cette multiplicité de personnalités à incarner sur scène. Noah était-il du genre à céder à la panique quand trop de regards étaient posés sur lui ? Pas le moins du monde. A vrai dire, sa méconnaissance du sujet artistique était aussi un danger en soi.



Au vu des interrogations de la jeune femme, dont il ne connaissait toujours pas le nom au passage, Noah se doutait que l'idée risquait fort de ne pas l'emballer. Etait-ce si dur d'endosser un rôle dans une pièce de théâtre sans n'avoir eu aucune séance d'entraînement auparavant ? Probablement. Mais comme le metteur en scène semblait insister sur le fait que la pièce ne pouvait pas être annulé comme ça,  sans doute était-il possible de se débrouiller.



Quelque part, c'était un petit coup de chance pour Noah, qui se retrouvait avec une occasion en or de se confronter à un nouvel adversaire. Cette femme l'intriguait depuis le début de leur conversation. Il ne savait pas réellement si elle combattait réellement, mais ça valait au moins le coup pour s'amuser. De toute façon, le cactus ne se voyait pas assis sur une chaise pendant deux heures à regarder des acteurs se battre artificiellement.  Attendant la réponse de la demoiselle, le shinigami jeta un oeil aux alentours, observant le public qui s'impatientait de plus en plus.

Pour tenter de dissiper le mécontentement, les autres acteurs de la troupe de théâtre se mit à effectuer une représentation d'une autre pièce, une sorte de bouche trou le temps qu'une solution soit trouvée pour leur petit soucis de casting. En les regardant, Noah eut la pensée que sur scène,, l'impression devait être radicalement différente quant au rôle qu'on nous incombait. Le problème qui se posait en tant que comédien, était que malgré les répétitions, l'échec ne pouvait jamais être écarté. Ce défi était de taille, et le Kaiin de la Gobantai lui-même ne savait pas encore si il pourrait le relever.

Les acteurs principaux ? Il voulait que vous deux prennent la place d’acteurs principaux ? Lui ne connaissait même pas la pièce et toi… Et toi, tu étais trop discrète pour te retrouver sur scène, pas assez à l’aise devant un large public lorsque tu n’étais pas dans ta zone de confort, comme dans ton atelier par exemple. Alors tu soupirs, te mordilles la lèvre inférieure, un peu hésitante, le refus serait si facile et pourtant, face à son regard plus insistant, tu te retrouves à peser le pour et le contre. Ça ne pouvait pas vraiment te faire de mal, si ce n’est que peut-être te ridiculiser parce que tu n’avais aucune idée de ce que tu devais faire ou encore comment le faire. Tu savais, certes, te battre, surtout avec une arme, mais était-ce suffisant. - Ne serait-il pas mieux d’annuler la prestation plutôt que de demander à deux inconnus de monter sur scène ? Ça te semblait être la chose logique à faire, la suite naturelle des choses, mais tandis qu’une autre pièce, plus courte, prend place sur scène, histoire de gagner un peu de temps, tu comprends que ce n’est pas la solution choisie.

Tu fronces légèrement les sourcils à ce qu’il ajoute, tentative supplémentaire de te faire accepter la demande qu’il te fait. - Et vous pensez pouvoir y accéder ? Sans même savoir ce que je pourrais vous demander ? La surprise se fait entendre dans ta voix, la méfiance aussi. Surtout qu’au final, tu ne sais même pas toi-même ce que tu pourrais lui demander, alors comment peut-il proposer ça avec autant de certitudes ? Un énième soupir s’échappe de tes lèvres avant que tu n’hoches finalement de la tête. - D’accord, d’accord, je vous suis. Il suffit que de se battre avec un katana sur scène, c’est bien ça ? Ça devait sans doute être plus que ça, suivre la narration surtout, mais bon… Tu n’étais pas obligée de parler et ça va, tu connaissais bien les armes.

Et c’est pour cette raison que tu le suis jusqu’en coulisse, là où quelqu’un vous arrête avant de déposer dans vos bras vos costumes à enfiler pour l’occasion. Tu soupirs, encore, avant de disparaître de la vue des autres, enfilant le yukata traditionnel de samuraï avant de glisser l’arme factice que l’on vient de te donner dans son fourreau. Tu ne sais toujours pas pourquoi ni comment tu t’es laissée entraîner dans toute cette histoire, tu sais seulement qu’il est trop tard pour reculer. - Tu es prêt ? Que tu lances à ton partenaire improvisé après un rapide résumé de la pièce de théâtre pour vous indiquer ce qui était attendu de vous.

Cette femme possédait un esprit assez logique, Noah le reconnaissait volontiers. Effectivement, il était assez inconcevable de songer à démarrer cette pièce alors que les pierres angulaires de cette dernière était absents. D'autant plus que ce n'était pas comme si il s'agissait de leur représentation la plus lucrative. En pleine journée, avec un public, certes important, mais beaucoup moins qu'en fin de soirée, ce n'était pas sur cette partie-là qu'ils allaient pouvoir créer la différence. La seule véritable raison qui devaient les pousser à continuer malgré tout, se situait sans doute ailleurs. Après quelques instants de rélfexions, Noah se décida de placer une petite théorie.



Le raisonnement du Shinigami se basait bien entendu sur sa seule expérience militaire, n'étant pas spécialement féru de poésie ou de dramaturgie. Toujours est-il qu'il avait embarqué une jeune dame dans cette histoire. Peut-être même qu'elle ne savait pas combattre à l'épée ? Mais ça, il en doutait fort, notamment à cause de sa posture assise qui la trahissait. Droite, déterminé, sur ses gardes. Elle n'était pas naïve, ni faible.  Un léger sourire apparu aux lèvres de Noah alors que la jeune femme s'interrogeait sur le bien fondé de sa proposition. Il était vrai que le cactus semblait de plus en plus intéressé par son interlocutrice.



Les choses sérieuses allaient commencer. Pour une première expérience du théâtre, ça y allait fort. Voilà que Noah se retrouvait déjà en coulisses, attendant patiemment qu'on lui fournisse les explications nécessaires. Une vêtu convenablement aux couleurs d'un des frères, on confia au Shinigami de la Gobantai un katana factice, censé servir d'arme quand il s'opposerait à son "rival". Ce moment ne tarda d'ailleurs pas à arriver. Suite à une fastidieuse narration censé garder le spectateur en haleine, Noah et son acolyte se présentèrent sur scène, se faisant alors face. Empoignant son katana d'une main, il adoptait alors une pose qui, pour un connaisseur, témoignait d'une maîtrise des postures relativement avancées. Le premier qui attaque gagne, en règles générales. Dans notre cas, c'est le plus acharné qui arrache la victoire.



Il bondit alors en avant, dégainant son faux katana, qui pesait d'ailleurs bien moins lourd. D'un geste vertical, il allait suffisamment lentement pour que son adversaire puisse contrer, mais assez rapidement pour que le spectateur ne puisse se douter que le coup soit intentionnellement faible...

Il n’avait peut-être pas tort, mais ça ne t’empêchait pas de soupirer à nouveau. Tu n’aimais pas être sous les feux des projecteurs, encore moins sur scène et là, on te demandait de te présenter devant une large foule. Tu savais le faire lorsque venait le temps de parler de tes projets, mais pour une pièce de théâtre dont tu te retrouvais être actrice sans trop comprendre pourquoi ? C’était une toute autre histoire. Une histoire dans laquelle tu te laisses finalement entraîner, un peu contre toi, face à la conviction dont il faisait preuve. Parce que tu ne sais peut-être pas dire non face à une demande aussi sincère, une envie de sa part de prendre part à ce spectacle qu’il ne connaissait pourtant pas. Et c’est une fois affublée d’un costume encombrant presque tes gestes, avec une arme à ta taille, que tu te retrouves à faire tes premiers pas sur scène, tes cheveux courts ramenés derrière ton oreille. Lui demandant alors s’il est prêt, il ne perd pas de temps à te répondre, dégainant son arme alors que la voix du narrateur se fait entendre, prêt à raconter l’histoire du combat que vous alliez mener.

D’un geste vif, expérimenté, tu attrapes ton arme pour venir t’opposer au coup qu’il te porte. Tu bloques sans trop de difficulté, constatant toutefois que ton adversaire sait se battre. Tout comme il sait aussi faire preuve de modération, signe qu’il semble avoir un certain contrôle de ses mouvements. Tu décides donc de répondre rapidement, levant ton arme, l’abaissant rapidement, assez pour impressionner le public, abattant un coup puis un second, sans pour autant chercher à le blesser. - Quelle division ? Que tu lui demandes, presque tout bas, pour que la foule n’entende pas, cette dernière de toute façon captivée par le récit du narrateur et les coups de vos épées s’entrechoquant.

Ce n'était clairement pas une débutante. Quelque part, Noah s'en doutait bien. Cette femme dégageait quelque chose de différents des autres âmes présentes et insouciantes dans la foule. La manière dont elle para son coup d'estoc, dont elle ne faillit pas d'un centimètre, son regard toujours aussi perçant... Oui, c'était une combattante digne de ce nom. On était loin des sorciers marginaux comme pouvait l'être Yoh, un type des plus étranges, bien que sympathique. En tout cas, le Shinigami prenait déjà plaisir dans ce combat factice.

Maintenant, c'était à son tour d'attaquer, alors que le narrateur entamait la suite du récit. Deux frères ennemis, que tout opposait, et qui pourtant se retrouvaient affublés d'un même destin, celui de vaincre le Mal, de faire triompher le Bien. La femme au regard d'aigle représentait les forces du Bien, celles qui restaient droit dans leur bottes. Noah, lui, était la personnification du frère maléfique, celui qui avait vacillé au profit des ténèbres, et qui cherchait maintenant à s'opposer à son propre reflet. L'histoire de la pièce était on ne peut plus classiques, mais c'était également dans l'habitude qu'on trouvait le meilleur réconfort.



Une conversation couvert par les exclamations et le bruits des lames s'entrechoquant. Cette femme était bien évidemment une Shinigami, mais il ne l'avait jamais aperçu dans les quartiers de l'Etoile du Nihon. Elle ne serait tout de même pas une rejeton des Premiers-Nés ? Si c'était bel et bien le cas, Noah aurait du soucis à se faire. Cette division était réputée pour y regrouper les plus grands malades de leur génération. Vérité ou simples rumeurs ? Rien n'était moins sûr. Ce qui l'était en tout cas, c'était l'attaque de son adversaire qu'il sentit bien passer, même s'il parvint à la parer. Sa force était donc aussi grande ?! De se dire qu'elle se retenait actuellement, ce genre de pensée faisait sourire le cactus.




Reculant d'un bond, Noah rangeait l'épée. Le premier acte touchait à sa fin, et les autres comédiens s'apprêtaient à prendre place sur scène. Il était l'heure pour les frères de faire une pause.

La cinquième division, donc. Ça expliquait sans doute son aisance avec une arme, la facilité qu’il avait à contrer tes coups, à riposter. Parce que c’était ce qu’il faisait de son quotidien, manier une arme. Ou, tout du moins, c’était l’idée que tu te faisais d’un membre de la cinquième division, ces samouraïs qui veillaient sur le Nihon. Tu parviens tout de même à tenir le rythme, sans doute parce qu’il s’agissait-là d’un faux combat et qu’il ne cherchait pas nécessairement à te vaincre. Ce n’était que pour le spectacle, des gestes précis qui se voulaient impressionnants pour épater le public. Ce n’était pas quelque chose dont tu avais l’habitude, quelque chose que tu faisais souvent, mais, finalement, tu ne pouvais pas nier trouver ça amusant, cet entraînement improvisé qui n’en était pas vraiment un, cherchant seulement à marquer l’esprit du public.

- Nibantai. Ça ne paraît peut-être pas, mais je suis une scientifique. Une ingénieure, plus précisément, mais tu n’as pas le temps d’apporter cette précision, répondant à l’échange, ta lame factice glissant contre la sienne avant que, finalement, une pause vous soit imposée, l’entracte permettant aux acteurs de se reposer et à la foule de se dégourdir les jambes. De retour en coulisse, tu souffles un peu, un sourire sur les lèvres alors que tu diriges ton regard sur ton partenaire pour la journée, celui qui représentait les forces que tu te devais de vaincre.

- Moi aussi j’ai bien aimé. En riant un peu. - Et bon, ce n’est pas terminé. Je dois gagner. Une pause, petit sourire en coin avant de poursuivre. - Pour que finalement tu me renverses. Parce que le bien ne peut pas exister sans le mal et l’inverse est toute aussi vraie. C’est ça que raconte l’histoire, si tu ne le savais pas. Toi tu la connaissais bien, par coeur même, alors tu prends la peine de lui expliquer brièvement l’histoire, au cas où il n’écoutait pas la narration. - J’espère donc que ton égo n’aura pas trop mal de perdre sur scène. Plus taquine, alors qu’au final, toi aussi tu allais perdre, aucun n’en sortirait victorieux de cet affrontement.

Le Consortium, sérieusement ?! Parmi toutes les divisions qui composaient le Goteijutai, le corps de la Soul Society, les yeux, les oreilles et le bras armé du Concile Blanc, jamais Noah n'aurait parié le moindre hansatsu que cette femme appartenait à la Nibantai. Le bretteur en avait une idée toute faite, contrefaite. Des préjugés basés sur les dires d'autrui. Mais il savait qu'il ne s'agissait pas d'une division de combattants, bien au contraire, on faisait ici plutôt référence aux cerveaux du Seireitei, les grosses têtes quoi. Pour Noah, c'était une véritable découverte. La scientifique savait donc également manier une lame.



Cette information n'était pas seulement amusante, mais très enrichissante. Le cactus n'avait pas toujours l'occasion de pouvoir rencontrer un membre du Consortium, et le hasard faisait qu'un tête à tête avec une scientifique lui était offert sur un plateau d'argent, ou plus exactement, sur une véritable scène. De nombreuses questions taraudaient l'esprit de notre protagonistes aux trois sabres, des interrogations qu'il n'étalait pas, lui qui avait surtout l'habitude de croiser le chemin de grandes brutes comme lui. Il tentait de conserver une certaine noblesse dans ses actes, mais force était de reconnaître que le combat était le langage qu'il maîtrisait le mieux.



Son ego, elle le soulignait bien, n'allait certainement pas le laisser perdre face à une scientifique, aussi forte pouvait-elle être. Mais leur pause n'était pas terminée, assis sur une caisse disposée dans les coulisses, Noah observait les comédiens sur scène, attendant patiemment son retour, sourire aux lèvres.



Pour mater un adversaire, il fallait tout d'abord apprendre à le connaître.

Et oui, derrière cette aisance que tu avais à manier le sabre, trahissant ainsi un rigoureux entraînement et des années d’expérience, tu étais de ces intellectuels, fière membre du Consortium, scientifique avant d’être combattante sans pour autant en oublier ton rôle, celui de protéger les humains des menaces qu’ils ne pouvaient même pas voir, encore moins comprendre. - Surpris ? Plus amusée qu’autre chose, ayant l’habitude des jugements rapides. Il n’était pas le premier et ne serait définitivement pas le dernier, pour beaucoup le fait que tu passes le plus clair de ton temps dans ton atelier, derrière un bureau, signifiait que tu y avais sacrifié des capacités martiales. Alors que pourtant, n’ayant pas besoin ni de manger, ni de dormir, tu pouvais profiter pleinement des vingt-quatre heures de chacune des journées qui passaient, et ce depuis plus d’un siècle.

Autant dire que tu avais acquis beaucoup d’expérience, depuis le temps.

Un petit rire traverse tes lèvres, amusée par sa réaction. - Ce n’est pas très professionnel, ça, monsieur l’acteur, de ne pas respecter le scripte. Que va dire le metteur en scène ? Les fans qui attendaient avec impatience cette pièce ? Pourrais-tu vivre en sachant que tu as bafoué ainsi l’oeuvre d’un grand hauteur ? Plus dramatique que tu ne l’es vraiment, tu dis ça avec un petit sourire, faisant toutefois mine d’être choquée de tant de nonchalance de sa part.  

Le sujet revient toutefois vers la seconde division, celle à laquelle tu appartiens et il y a cette flamme qui revient dans ton regard, celle d’une passion que tu ne peux pas taire concernant tout ce qu’il t’est possible de créer. - Je fais partie de l’axe d’ingénierie, donc... Je me penche surtout sur les nouvelles technologies, sur les armes, les armures, un tas de trucs comme ça, quoi. Je recherche les différentes propriétés des matériaux utilisés, tout ça dans l’idée d’aider l’armée à ce que tous soient plus performants et mieux équipés. Mais je me doute que ça peut sembler barbant pour quelqu’un qui n’aime pas ce genre de trucs. Tu ne lui en veux pas, tu peux même comprendre, en fait. Seulement, il ne fait aucun doute que toi, tu adores ce qui t’est donné de faire depuis les dernières décennies.

Après tout, ils n'étaient pas responsables des troubles organisationnelles de cette troupe de théâtre qui avaient contraints notre héros à revêtir la cape d'un personnage fictif le temps d'une journée. En compagnie de Sana, une véritable rixe avait débuter et les lames échangeaient de prodigieux coups, surprenant le public qui poussaient de véritables cri d'ébahissement à chaque échange. Pour Noah, c'était une nouvelle occasion de s'échauffer. Lui qui avait souhaité profiter d'un peu de temps libre pour se détendre, le naturel lui revenait au galop. Ce n'était pas particulièrement pour lui déplaire, néanmoins.



La vie, tout comme une pièce de théâtre, était faite de surprises en tous genres, plus ou moins mauvaises selon les situation. La scientifique semblait également s'amuser durant ce faux combat, qui n'en était plus vraiment un en réalité. Il ne fallait pas non plus oublier qu'elle était aussi une Shinigami qui avait reçu une certaine éducation militaire. Face à des Yokai, elle devait certainement savoir quoi faire, peut-être même mieux que Noah. Poursuivant leur discussion au beau milieu de leur affrontement, le sourire de Noah grandissait, comprenant parfaitement le domaine d'expertise de la membre de la Nibantai.



Cette philosophie faisait honneur à l'instinct guerrier du Kaiin de la Gobantai. Cette dernière se spécialisait bien dans le Bushido, ce code d'honneur des samurai que le cactus s'évertuait à faire prospérer. Tant et si bien qu'il en était arrivé à développer son propre style de combat. Voyant le metteur en scène derrière les coulisses qui commençaient à s'agiter, remarquant que Noah déviait peu à peu de son rôle initial, ce dernier s'amusait bien de la situation. A ce moment là, une troupe de gardes, joués par les acteurs de la troupe, vinrent encercler les deux "frères". Sana et Noah, encerclés, arrivaient à cette célèbre scène de la pièce où les deux frères ennemis s'alliaient une ultime fois contre une armée d'envahisseurs barbares.



Sur ces mots, Noah se jetait dans la mêlée, se retrouvant face à deux gardes armés de lances..