Que pouvais-tu bien faire dans un lieu si éloigné de ton affectation ? Jouer les gros durs comme tes pairs ? Certainement pas. Disons-le très clairement, tu étais là pour découvrir un environnement qui était inconnu pour toi, et peut-être jouer quelques tours aux personnes qui tu pourrais rencontrer sur le chemin. C’est donc animé de cette volonté que tes pas te conduisirent directement à Hiroshima, une des provinces de la sixième division. 

Pour ne pas déroger à tes habitudes tu comptais amplifier les traits de caractères des Premiers-Nés, la division dont tu étais issu, même si en réalité tu étais bien différent de ces derniers et en tout point. Il était difficile pour toi de rester enthousiaste dans ce complètement mort. Non pas dans le sens propre mais plutôt qu’il n’y avait pas grand-chose à faire dans le coin, excepté la visite des temples. 

-Je plains la division qui est en charge de ce secteur parce que c’est pourri par ici. J’espère au moins me consoler sur quelqu’un, afin de rentabiliser mon déplacement.

C’est en marmonnant que tu te dirigeais au sanctuaire d’Itsukushima pour espérer trouver une âme à qui jouer un tour comme tu avais le secret. Au loin, tu arrivais à apercevoir une silhouette à proximité du lieu de culte. Cette présence te rassurait un minimum et te motivais à accélérer le pas dans le but d’aller à sa rencontre. 

Une fois arrivé jusqu’à cette personne tu remarquais quelque chose qui le distinguait des autres shinigamis. Etait-il un Joukan tout comme ceux qui tu avais eu la chance de côtoyer ? A première vue il était aussi gringalet que toi, mais tu ne t’arrêtais pas sur ce premier jugement, car tu savais que les apparences pouvaient être trompeuses. Tu en savais quelque chose, étant donné que tu renvoyais l’image que les gens voulaient voir de toi, c’est-à-dire un Premier-Né idiot et bagarreur. 

« Bonjour, c’est bien ici le temple Itsu-je sais pas quoi ? » évidemment tu savais prononcé le nom de ce sanctuaire mais tu le fis exprès afin de voir la réaction de ton interlocuteur. Et comme à chaque fois tu ponctuais tout ceci par un sourire innocent. 

Yaaaaaaaaah, cela faisait du bien de profiter du calme, de temps en temps. Le ciel était bleu. Le soleil brillait sous les nuages blancs. Mais, plus important… C’était le fait d’être seul… Être en tête à tête avec ce que tu aimes le plus au monde… Ton âme sœur, même ! Oui ! Vous voyez de quoi je parle ! Je parle d’un bon plat ! Et pas n’importe lequel ! Je veux parler d’un bon Ramen fait maison !


Un de nos Keihai se rappelait avoir été cuisinier durant son vivant. Il voulait garder cette habitude, histoire de garder un lien avec son ancienne vie. C’était tout ce qui lui restait d’elle. Il était vrai que lorsqu’une âme arrivait dans la Soul Society, elle ne conservait qu’une bride de son passé. Je n’avais pas ce problème-là, ayant toujours vécu au Seireitei aussi loin que je me souvienne. J’étais né ici et je n’avais aucune de mémoire. Bref, il m’avait fait un bol de Ramen que je pouvais déguster tranquillement. Les âmes n’avaient pas besoin de manger pour vivre, mais ce n’était pas une raison de ne pas profiter des bonnes choses de la vie !



Alors que je mangeais tranquillement mon repas, je sentais la présence d’un Shinigami qui m’était inconnu qui approchait. D’abord, je n’en faisais rien. Il avait le droit de se promener dans le coin s’il le voulait, je m’en fichais tant qu’il ne causait pas de problème. Puis, ensuite l’individu entra dans mon champ de vision. Un blondinet qui avait l’air un simple d’esprit. Apparemment, il cherchait le temple Itsukushima tiens. Je me demandais bien pourquoi. Nouvelle recrue ? Touriste ? Encore un qui avait besoin des services de la Rokubantai ? Tout en continuant de manger mon bol, je lui répondis simplement :



Autant vite m’en débarrasser en l’aidant pour retourner à ma tranquillité. Enfin, je ne voulais pas paraitre impoli ou pressé. C’était pour cela que je restais simple. De toute façon, je n’étais pas en état de me prendre la tête. En fait, je ne l’étais jamais.

Amusé par la situation tu rapprochas ton visage au plus près du bol de ramen, simulant un désire d’appétit en voyant ce plat si succulant. Cette proximité si soudaine pouvait certainement troubler le pauvre jeune homme qui n’avait rien demandé dans cette histoire, mais toi tout ce que tu souhaitais, c’était de le titiller afin de voir ses limites. Fallait-il qu’il en ait et cela n’était pas garanti. 

Balayant du regard à tour de rôle la nourriture et le visage du Joukan, tu essayais de lui faire comprendre par cette attitude que tu convoitais son repas, certes il n’allait pas apprécier la démarche, mais au fond tu t’en contrefichais totalement. Jouer les idiots était une chose que tu pratiquais à merveille, à tel point que l’on pouvait se demander si tu n’étais pas réellement idiot. 

« Tu vas réussir à manger tout ça l’ami ? Si jamais tu ne finis pas, je suis là hein. Eheh. » 

Le temps d’un instant tu avais plus ou moins oublié l’autre raison qui t’avais poussé jusqu’au territoire des Parles-Esprits. Sans véritablement le lui demander, tu pris place aux côtés du mangeur de nouilles, et oui tu te sentais relativement à l’aise à ce moment-là. Un peu trop à l’aise même. Franchement qu’est-ce qu’on allait faire de toi, hein….

« Surtout ne te presse pas à engloutir ton repas, ce que j’ai à faire peut très bien attendre. Ne t’en fait pas. » dis-tu avec bienveillance. « Si t’es là ça signifie que t’es un Parle-Esprit, c’est ça ? Moi c’est Roku de l’Ichibantai. Ravie de faire ta connaissance tête de ramen ! » tu exprimas limite un sourire sincère.

Soyons honnête. Le surnom que tu venais de lui donner ne servait qu’à une seule et unique chose : l’énerver. Au fil des années, tu constatas que les personnes détestaient être surnommés surtout lorsque cela venait de parfaits inconnus. Allait-il comprendre que tu jouais avec lui ? Peut-être bien. Etonnement, tu fis disparaitre ce sourire niais de ton visage pour laisser apparaitre une mine un peu plus sérieuse. 

« En tant que Shinigami, tu ne te poses pas de questionnement sur le fonctionnement du Nihon ? » 

Poser cette question te permettait de positionner ton interlocuteur dans une case. Effectivement, avec un sujet aussi large ce dernier pouvait faire un faux pas dans sa réponse, tout comme te répondre correctement. La balle était dans son camp.

Je ne m’attendais pas à un tel oiseau… D’autant plus qu’un oiseau, ça ne te collait pas aussi près ! Wow ! Mon espace vital était violé ! Entré par effraction ! Je ne mangeais pas de ce pain-là, moi ! Je voulais juste manger mon plat tranquillement ! J’avais compris qu’il voulait avoir ce repas, mais… Mec, t’étais déjà mort, c’était pas comme si tu allais en crever ! Wow ! Wow ! Bon, il commençait à être ennuyant, là ! Même si j’adorai la Ichibantai… Il y avait des limites à respecter !


Bon, je le lui donnai quand même le bol pour qu’il me lâche un peu. D’ailleurs, il m’avait donné un surnom… Tête de ramen ? Bon, on pouvait dire que ça symbolisait notre rencontre. Je ne savais pas qu’il y avait des simplets aussi chiants dans la Ichibantai. Il était différent de Tensai, en tout cas. Et de Narimasa. Ensuite, il me posa une question sur le Nihon. Wow, il était spécial celui-là. Ce que j’en pensais ? Parfois, poser des questions comme ça voulait dire que le questionneur voulait répondre à cette question, quelque soit ma réponse… vous m’avez suivi ? Non ? Bon.


Même s’il pouvait le demander à des gars de sa division… Il avait sans doute ses raisons pour me poser cette question.

Après l’avoir longuement tanné, pour recevoir une part de son bol, tu déclinas respectueusement suivi d’un léger sourire, avec ce geste tu allais certainement le troublé davantage. Si ce n’était pas déjà le cas. Il fallait dire que tu étais une personne atypique haut en couleur. Pour le bien de Sora, il ne fallait pas que tu trouves le repos éternel sinon tu avais la capacité de trouver un moyen pour l’emmerder, même une fois mort. 

« Enchanté de faire ta connaissance, tête de ramen. » dis-tu avec un regard espiègle. Bien entendu tu ne respectas pas non plus la distance qu’il désirait imposer entre vous. Pourquoi ce refus ? Pour l’embêter tout simplement.

La question au sujet du Nihon semblait déranger le Parle-Esprits mais pour quelles raisons ? Ne s’était-il jamais interrogé sur le monde qui l’entourait ? Faisait-il son travail machinalement ? Laisser ces zones d’ombres ne te plaisait guère et c’est pourquoi tu ferais tout ton possible pour en apprendre plus sur cet individu, parce qu’il t’intriguait fortement.

« Je n’aurais pas fait tout ce chemin jusqu’ici, si je ne voulais pas entendre ton avis sur la question, et malheureusement c’est tombé sur toi. Bon je sais plus ou moins ce que tu vas me dire, que ta division s’occupe essentiellement des esprits et je suis d’accord avec ça. Mais tu ne t’es jamais intéressé à ce qui se passait en dehors de vos murs ? Comment était structuré notre société ? »

Pour la première fois tu mis de côté ta personnalité dite débile pour être on ne peut plus sérieux. 

« S’il te plait… J’aimerai avoir l’opinion d’un Joukan là-dessus. » volontairement tu lui fis comprendre que tu avais remarqué sa distinction et tu étais loin d’être sot comme tu pouvais le laisser penser. A présent la balle était dans son camp. Qu’allait-il en faire ? Telle est la question…

C’était vraiment un drôle d’oiseau qu’on avait là. Il m’avait saoulé pour avoir mon bol de ramen et voilà qui refuse. Et qui restait trop prêt de moi… Que faire… Est-ce que je lui fous le bol dans la figure ? Non, ça serait du gâchis… Un si bon ramen… Pour le moment, restons calme. Pendant qu’il me parlait, je reculais sur le côté. Il y avait tout de même un minimum de distance social à respecter, bordel ! Je commençai à me dire que c’était vraiment le genre de mec qui était là pour faire chier son monde par pur sadique. Et puis, sa curiosité… Bon, moi aussi, j’étais curieux de nature, mais là…

Pourquoi voulait-il tant savoir ce que je pensais sur le fonctionnement du Nihon ? En plus, il me sortait un préjugé sur la 6e Division, qui était vrai, fallait l’admettre. Mais, tous ne pensaient pas seulement au bien être des esprits. Et on n’était pas totalement reclus derrières nos murs, même si on était loin du Seireitei. Le blondy reconnu au moins mon grade, mais n’en faisait rien. Ce qui me faisait plaisir, dans le fond. Marre des protocoles derrière les titres et les grades…

Je laissais un silence. Je ne lui répondis pas tout de suite. Testons maintenant sa patience. Je mangeais tranquillement mon bol de ramen. Lorsque j’arrivais presque à la fin de mon plat, après avoir avalé une grosse bouffée, je lui répondis enfin :


Puis je finis le reste de mon repas et tendis le bol à Roku.

-C’est une blague j’espère… Comment ce type puisse avoir des responsabilités ? Le système de la Soul Society est bancal depuis la disparition des regrettés capitaines, mais pas au point de mettre un épouvantail au poste de Joukan, et encore ce qualificatif est trop mesuré pour le définir. Une erreur administrative, je ne vois que ça pour expliquer cette anomalie. Une véritable catastrophe si l’ensemble des Parles-Esprits étaient comme lui, même les Marches-Failles ont plus de valeurs. Mon dieu…

Consterné. Voila dans l’état dans lequel tu te trouvais à la suite de la réponse très originale du Parle-Esprit. Heureusement pour lui, tu avais décidé de te murer dans le mutisme pour à la fois digérer cette information et surtout pour ne pas l’incendier. De tous les gradés que tu avais pu côtoyer, le mangeur de ramen était celui qui faisait tache au sein de cette échelle hiérarchique et cet homme pouvait donner de l’espoir aux incompétents de son espèce. Triste histoire…

Tu cogitais encore et encore comme si cette information t’avait totalement bloqué. Tu ne savais plus quoi penser de toute cette nonchalance dégagée par le Joukan, tu en venais même à te demander s’il était comme toit, du moins le « toi » lorsque tu étais en présence d’individus. Jouait-il un rôle ? Était-il réellement sérieux ? A prime à bord, le jeune homme paraissait vrai autant dans son attitude que dans son expression verbale. En dehors de la Sixième, l’officier Masamune n’aurait pas fait long feu avec cette vision désinvolte. Etait-il également comme cela lors des réunions entre gradés ? Rien que d’y penser, des frissons parcoururent tout ton être.

Bon, à présent il fallait lui répondre surtout après un long silence. Mais quoi rétorquer face à cela ? Machinalement et pour éviter d’accentuer la gêne, tu lui tapotas l’épaule en rigolant de bon cœur. Clairement, il ne méritait pas ce geste d’attention mais tu te contentas de rester dans ton rôle de camarade idiot. 

« Eheheh. J’aime beaucoup ton humour tête de ramen, sache-le. T’as sans doute loupé ta vocation, qui sait. »

A la suite de ces paroles, tu te relevas pour signaler ton départ, il était inconcevable pour toi de rester une minute de plus dans les parages. Tu en avais assez vu et entendu. 

« Au plaisir de te revoir l’ami ! Et encore merci pour le moment passer ici. » 

D’un signe de la main tu le saluas et tu te mis en route vers d’autres destinations…

-J’en connais qui vont bien rigoler lorsque je leur raconterai.