Bouffée d’air frais.

Un monde inconnu. Une flore éparse et touffue. Où est-il ? Le Héros des Couchants et des Levants ne se souvient que de l’océan de désespoir. Quelques rotations de poignets et d’épaules chassent la léthargie installée. Phare spirituel ; le Reiryoku s’échappe de tous les pores de son être. Un appât vivant - dans une certaine mesure.

A trois reprises, ses doigts se referment sur eux-mêmes. L’hôte tend sa main droite en direction de la sylve. La dizaine de mètres est dévorée sans qu’il ne s’en aperçoive ; réflexe inné. L'aspérité de ladite paume effleure l’écorce séculaire. L’arbre est broyé, puis propulsé en arrière. Une portion de ses congénères derrière lui le suit ; les chênes se plient pour offrir un nouveau sentier.

Une force prodigieuse l’habite.  

Des capacités latentes - encore ignorées par leur porteur - s’éveillent. Bruits de pas lourds. Quelque chose d'imposant s’approche de sa position. Une faim lancinante brûle son abdomen. Dévorer. Voilà ce que lui susurre un subconscient partial. Son corps agit de lui-même et effectue un pas en avant. Le contrôle défaillant de sa vélocité le projette à toute vitesse contre la mer végétal. Cette ruée incontrôlée barre la route au Goliath. Le Nivéen retire sa tête du bois pulvérisé.

Une image rémanente de sa précédente position jalonne son départ. Le dos argenté fait front au Colosse. Son tronc se plie sur la gauche, bras du même hémisphère armé en retrait. Une seconde image rémanente se produit alors que ses phalanges cherchent à faucher la cage thoracique du Géant dans un mouvement ascendant ; uppercut à la puissance colossale. Une bête sauvage à la chevelure d'albâtre. Un Gorille.  

Le plus drôle dans tout ça ? Hachiman découvre le visage de sa proie qu'après coup.  

L'astre solaire sortait peu à peu de sa torpeur alors que tu avais entamé ton avancée depuis quelques heures déjà. Au sein de la circonscription de ta division chérie, tu avançais à pas lourd. Missive dans la main droite, tu étais missionné, seul, pour venir à bout d'une petite menace itinérante qui traînait depuis quelque temps dans la région. Une créature démoniaque semblait avoir établi son camp de fortune non loin d'un petit village séculaire ayant résisté à tous les envahisseurs depuis des générations. Une engeance de l'enfer ayant fait de ce village son garde-manger, tu te devais de faire quelque chose. Bien que tu n'en avais, littéralement, rien à foutre de l'avenir des humains lambdas, tu ne pouvais laisser un yokai sur ton territoire, sur ton propre terrain de chasse.

Arpentant ce pandémonium sylvestre, tu te rapproches d'une présence. Doté d'environ aucun don de senseur, seule une énergie spirituelle sortant largement de l'ordinaire pouvait te piquer d'intérêt. Tes pas ce stop un instant, confiant qu'avec tes nouvelles habilités au combat, une simple menace ne pourrait stopper ton avancée.

Une entrée d'anthologie pour l'âme se ruant sur le Colosse rougeoyant. Masqué, ton visage ne prête aucun sentiment de peur à son arrivée fracassante. Maître en déplacement et rapide comme un fauve, ta proie semble te prendre pour cible. Sans pour autant lui adresser le moindre regard, tes yeux ne pouvant suivre sa vitesse irréelle, trois remparts de fer sortent de tes runes, t'entourant de toute part pour contrer le moindre assaut de l'animal.





Ton regard tourné vers l'horizon, aucune attention n'est prêté au sauvage sortant des fourrées. De nouvelles armes sortent de ton monde intérieur, trois lances, toutes marquées de la maîtrise de ton nouveau sigil : 璽 Ji. Les bras ouverts le long de tes hanches et les yeux fustigeant tes armes volatiles, elles s'élancent vers le ciel, avant de prendre en chasse ta proie. Une des armes arrivant par le haut, tandis que par la maîtrise totale de ton nouvel art, les deux dernières viennent prendre le sauvage dans un étau ; une devant, une derrière.

Une journée bien banale.  

La pression spirituelle que dégage l’Oozaru lui empêche de prendre ses adversaires par surprise. Phare spirituel, la crinière argentée n'est rien d'autre qu'un appat pour les grands dangers du Nihon. Trois remparts naissent du néant et cerclent le Colosse. Les métacarpes blanchis par la poigne du gorille se confrontent à l’un d’eux. La toute-puissance du Nouveau-Né annihile la protection ; subir ce coup aurait brisé la cage thoracique du Piton de la Fournaise. Goliath sait se protéger de David.

Impérieux. Belliqueux. L’attitude du masqué lui plaît.

Trois lances déchirent la trame de la réalité. Invocations d’une âme devenue experte dans l’usage des runes. Quel meilleur accueil aurait-il pu espérer ? Sous les injonctions de l’artilleur, les trois pilums chassent l’éburnéen. Un assaut mêlant ciel et terre. Les projectiles jaillissent depuis son dos, au-dessus et face à lui. Une trajectoire bien trop anormale pour être considérée comme naturelle. La tenaille perfore de part en part la précédente position de la cible. Image rémanente chassée, la vrille acrobatique exécutée permet à l’hôte de s’émanciper du danger. Senestre s’enroule autour de la troisième marionnette pour la propulser loin du champ de bataille.

Réceptionné au sol, le Nivéen disparaît.

Maître et doppelänger surgissent du néant, à la moitié du chemin. Le déplacement constant du primate produit une illusion déconcertante ; toute porte à croire qu’il existe deux ennemis et non un seul. Voir ses deux bourreaux n’induit qu’un seul constat ; un temps de retard sur la réalité. Les jalons du passé se succèdent au fur et à mesure de la percée. Hachiman émerge nez à nez au Titan.

Énième résurgence d’une action déjà terminée.

Des deux côtés du triangle, situé à une maigre distance l’un de l’autre, le binôme à la force prodigieuse compte triompher de la proie par une vraie tenaille. La représentation de droite tente d’écraser un puissant Otoshi-zuki initié par son bras gauche ; assaut descendant comparable au cross en boxe anglaise. Percuter le crâne du démon-rouge sous cet angle permettrait à la représentation de gauche de le cueillir par un lariat envoyé de manière circulaire via son bras opposé - et ainsi lui fermer toute fuite par le mur écroulé.

Une attaque en deux temps - en réalité séparée par une minuscule poignée de secondes - idéal pour la chasse au gros et initier des techniques complexes permettant de briser la santé mentale d’un pleutre.

Rapidité et puissance, un savoureux mélange que tu connais bien. Au sein de ta division, les Premiers-Nés sont les spécialistes pour ce genre de duo entre vitesse d'exécution, jeu de jambes et chaos provoquer au corps à corps. Des adversaires comme lui, tu en as affronté des dizaines, voir peut-être même des centaines. Cependant, une chose est sûre, c'est que son potentiel est infini ; tu la ressent, son énergie spirituelle débordant par tous les pores de sa peau. Qui est-il? Pourquoi t'attaque-t-il? Tu espères qu'il n'est pas comme toutes ses grandes gueules que tu côtoies à longueur de journée, pensant tous être les meilleurs combattants que le monde est connu. Si tel était le cas, alors il irait rejoindre les rangs des sans avenir de la division.

Un de tes remparts vol en éclat, pulvérisé par le crochet foudroyant de l'animal. Tandis que ta contre-attaque est annihilée par son agilité et sa vitesse au-delà du réel. Tu ne fait pas confiance en ton regard dans cette rixe, tu le sait très bien à la vu de ses "clones", sa vitesse dépasse bien trop ta réalité pour que tu puisses, ne serait-ce, que le suivre du regard. L'anticipation et la maîtrise de ton nouveau sigil sont ta seule alternative pour éviter un uppercut t'arrachant la boîte crânienne. Un petit sursaut de conscience te reviens, il y a de ça quelques temps, tu aurais été incapable de lutter contre un homme comme lui. Tu avais su combler tes faiblesses, il était temps de voir si cela avait changé quelque chose.

Tes armes runique tombent au sol, ton regard ne les suis plus, d'un léger pas sur le côté pour tourner ton regard face à tes deux remparts restants, tu replace tes bras le long de ta hanche, paume tournée vers l'horizon.




Tes derniers remparts s'élèvent face à l'assaut du sauvage, protégeant ta tête. D'un coup de main vers l'avant, tes protections sont propulsées sur plusieurs mètres, tentant de repousser l'envahisseur sur ton terrain de chasse. D'une nouvelle porte sur ton monde intérieur prennent vie trois nouvelles lances devant ton bras gauche, ainsi que deux boucliers de fer devant ton bras droit. Sa vitesse t'empêche de le prendre en chasse par tes armes de jet, la riposte est l'option.

Kento percutent le premier pan de mur ; creux du coude le second.

Les deux remparts explosent en une pléthore de projectiles. Un maelström de fer en quête de lapidation s’acharne sur le masque rouge. L’ubiquiste plonge dans la faille que cet écran d’obus lui offre. Vision noyée sous l’avalanche ferreuse, le Nivéen use de sa célérité manifeste pour surgir depuis le dos de son adversaire. Le souffle chaud du primate caresse la naissance d’une nuque. Dextre armée, les trois prochains coups seront décisifs ; Goliath y perdra son échine. Naissance des cervicales, vertèbres thoraciques, puis lombaires. Une offensive susurrée par une conscience affamée de moelle spinale. Métacarpes blanchis, l’assaut débute.

Une gerbe de sang humidifie son visage.

Violacé. Les crocs - d’un restant de mâchoire - trônent sur son poing. Le gorille ne percute qu’après coup ; une engeance inconnue s’est jetée sur son coup ou, plus précisément, sur sa proie pour chercher à tirer profit de la rixe. Les trois attaques mortelles ne se déclencheront pas. Pour la première fois, depuis sa renaissance, les iris nacrés du belliciste se confrontent à l’existence d’un yokai. Sur leur gauche, plusieurs arbres s’affaissent sous le poids d’une - ou plusieurs - entité. Une poignée de perdrix quittent la sylve en hâte, chassées par l’envahisseur.

Des menaces de premier cercle  s'échappent des fourrées ; les habitants du village sont tombés.

Derrière ce lâcher de chiens, la silhouette du corrupteur s’entraperçoit. Réflexe instinctif, le rachis du Simien confronte celui du Golgoth. Dos à dos, entourés par plus d’une dizaine d’anciens villageois. Le déchaînement de puissance est remis à plus tard ; une petite voix lui murmure, dans le creux de son ouïe, d’annihiler ce bétail damné. Ennemis d’hier, alliés de demain. La naissance d’un binôme qui influencera la Soul Society - et plus encore. La Crinière d’Argent et le Diable Rouge. Le Primate et le Colosse. La Fournaise Infernale et le Héros des Couchants et des Levants. Collaborer pour leur survie s’avère être la seule option face à cette lame de fond démoniaque.

Quand tu veux. Sale con.

La défense de tes remparts avait eu l'effet escompté. Cependant, c'était sans compter sur la sauvagerie et l'instinct guerrier du primate. Sans te laisser le temps de préparer au mieux ta prochaine défense, il venait de passer dans ton dos d'un mouvement si vif qu'il défiait la temporalité. Il allait être trop tard pour riposter, pour éviter une nouvelle fois de prendre les dégâts de ses assauts répétés. Tu marquas une légère pause dans ta réflexion, quelqu'un, ou plutôt quelque chose, venait marquer ton esprit, t'empêchant totalement de répondre présent à l'assaut fulgurant du sauvage. Une seconde d'inattention qui allait te coûter cher.

Tu attendais le choc pour voir l'étendue des dégâts, alors qu'une gerbe de sang venait marquer l'arrière de ton crâne et de nombreux organes venaient repeindre le sol face à toi.





Ton corps se tournait légèrement, afin de voir le sauvage réduire à néant l'existence même de cette engeance. Une frappe surpuissante qui t'aurait causée de lourds dégâts si le yokai ne s'était pas "interposé". Un véritable coup du destin, qui t'aurait sûrement esquissé un sourire si tu étais doté, ne serait-ce, que d'une pointe d'humour. Mais ton visage restait terne et froid, comme à son habitude.

Vos dos, larges d'un entraînement surhumain venaient se coller l'un à l'autre, faisant face à la masse de démon de Premier Cercle vous entourant maintenant. Et bien, cette journée connaissait son lot de rebondissement, cela changeait quelque peu des chasses sans saveurs que tu avais déjà pratiquées. Figé dans le temps, vous étiez les deux héros de cette histoire. Rivalité sous couverts de respect mutuel, vous étiez le présent et le futur de votre division. Digne d'un des tableaux recouvrant les temples des humains, kami parmi les esprits, votre histoire commune commençait aujourd'hui.





Petit pique en direction de ton ancien adversaire devenu allié de fortune, ton corps entamait sa danse. Les trois lances flottant face à ta main gauche, venaient transcender les cieux pour transpercer la première ligne ennemi. Prenant une trajectoire complètement irréelle animé par ton regard, elles venaient se stopper, se retourner, frapper, repartir dans tous les sens. Tandis que tes boucliers de fer de ton autre côté chassaient les premiers assauts de la horde. Ta main droite venait saisir ton arme scellée, l'éveillant à l'annonce de son nom. Le kabuki incandescent allait pouvoir reprendre.

Goliath prend Gorille de vitesse - quel comble ! De son côté, le Nivéen laisse sa tête basculer d’avant en arrière. Mélodie irréelle forgée au sein de son subconscient. Happé par le rythme endiablé, une série de petits pas s'enclenchent. Les épaules roulent, les bras s’agitent, petit pas en avant, petit pas en arrière, le tout mené par des claquements de doigts encourageant. L’engeance viciée ne représente aucun intérêt ; trop peu faible. Hélas, la situation l'oblige à perdre son temps ; poissons se pensant requins doivent être annihilés.

Le Colosse, quant à lui, préfère danser entre les lignes ennemies. De ses lances, il transperce les nouveau-nés. De ses boucliers, il nullifie leurs menaces. Un empire à lui tout seul. La Muraille-Vivante. L’un de ces rares guerriers affublés d’une aisance tant sur le point offensif que défensif. Ses pas hasardeux démontrent toutefois une certaine lacune ; nul n’est bon partout. Pas même ce Héros Légendaire. Le Simien surgit depuis les flancs du Titan. Pas mal pour un pleutre qui se terre derrière un masque d’enfant.

Pique accueillie, aussitôt renvoyée.

Toujours entraîné par sa valse, le Simien déclenche sa part des hostilités. Le hagar prend un malin plaisir à martyriser ses proies. Le voilà à surgir derrière ces yokai, tapoter leur épaule, puis disparaître - le tout à une vitesse dépassant la perception humaine. Quelques balayettes sont perdues çà et là, fauchant en même temps les membres inférieurs de l’essence démoniaque. Jalons du passée laissés derrière son sillage. Aucun respect ne caractérise ses simili-affrontements ; gifle surpuissante arrachant la mâchoire supérieure des cibles ; pichenette-briseuse-de-crâne et tout un tas d’autres actions humiliantes.

Rixe à sens unique.

Tête-Rouge est dévorée par le flot d’une flamme naissante. Katana devient Fléau. Une prouesse encore inconnue pour le Dos Argenté. Ce Démon surarmé a de la réserve, note-il. Dénouement sonné, le Mononoke, responsable de la corruption du village, surgit face à eux. Gueule ouverte, un dense rayon d'énergie dévore les mètres le séparant du binôme. Un Cero meurtrier fustige le dipôle. L’équipe de fortune reste, in fine, cernée par les résidus de premier cercle. Le contrôle du Byakko transcende la vie elle-même. Des pantins à ne pas sous-estimer ; ces derniers empêchant toute tentative de fuite inopportune. Autrement dit, voilà une armée de zombie immortelle contrôlée par le troisième œil du quadrupède.

Rictus. Here come the MBI.