Ô Kyuutei, tu incarnes la beauté que l’humain ne peut saisir. Sous ta majestueuse stature, tu domines le noble du vil. Austère, tous se conforment à ta doctrine. Tu irrigues les strates de la Soul Society de ton savoir. Panthéon céleste, tu es la mère nourricière de l’empire invisible. Héraut du Concile Blanc, nous sommes sous ton giron. De tes entrailles ne peut naître que le Sotaicho de demain ; l’élu auquel nous nous rallierons. Dans la mort, comme dans la vie, point de compromis.

Physique malingre masqué derrière un costard luxueux ; soie et brocarts. Tenue cérémonielle pour rencontre solennelle. Dans sa quête d’un meilleur lendemain, le criminologue arpente les longs couloirs du centre du monde politique. Terre de tous les vices. Apanage de vitraux, statues, lumières, peintures, tapisseries : le Mal se cache dans les détails.

Hélas, point d’hégémonie sans corruption.

Seul le candide tente de bâtir un monde nouveau. Fléau de notre époque, le crédule se terre derrière des utopies aux aspirations chimériques. Un moyen détourné de ne pas assumer sa piètre existence. Les codes éthiques et moraux nous emprisonnent d'avantages qu’ils nous lient. Le surmoi ne doit jamais contrecarrer le ça pour embrasser la pleine réalité extérieure.

Le réaliste, avant-gardiste parmi ses pairs, embrasse de son expérience la réalité du monde. Terre à terre. L’on ne peut changer les hommes. Créature viciée aux émotions contraires. Capable de tuer et de détruire toute vie par simple esprit de vengeance. Par simple esprit de conquête. Sans honneur, sans scrupule, ni parole.

Le monde n’est ni blanc, ni noir ; ni beau, ni laid ; ni triste, ni gai. Il est ce qu’il est et doit être compris sous cette focale. Vouloir l’extinction de l’humanité est aussi compréhensible que l’envie sadomasochiste de la préserver. D’aucuns acceptent ce constat, l’extrême majorité se fourvoie.

Le Bushido est une hérésie.

Doux bruit du gravier sous une bottine. Vierge de Bataille.  Les deux Joukan se réunissent dans le jardin intérieur de la cour impériale. Kakugyo, Sanbantai. Sollicitée, l'Impassible lui fit part - au travers d’une lettre - de son envie d’échanger avec elle. Elle, femme à la moralité prétendue parfaite. Les élections approchent. Et nul ne peut mieux comprendre son Lieutenant que celui sous ses ordres. L’on ne doit juger l’augure par ses discours embrasés. Non, pour cerner un empereur, nous nous devons de voir comment il traite et chérie son peuple.

L’action transcende les mots.

Initialement, le Garde des Sceaux se voulait la cible visée par cette entrevue. Hélas, Ryozuji Genichiro, Justice personnifiée, ne saurait se montrer impartial suite aux exactions de l'assassin solitaire. La mise en cage d'Araï Haku n'arrangeant en rien le tumulte...

La nouvelle semble inquiétante quand la samouraï relit pour la énième fois les lettres de ce Kakugyo. Une rencontre en privée avec un membre de la Troisième Division, il y avait tout de même de quoi se faire un peu de mouron surtout avec la tension entre cette division et la sienne. Par acquit de conscience, elle dépêche un membre de son axe pour être un témoin oculaire au cas ou les choses tournent mal. En aucun cas ce membre se doit d'intervenir ou de tenter d'écouter la conversation, c'est juste pour garantir que l'information circule si l'officier se fait sauvagement assassiner.

Sa lame tempête à sa ceinture, la main droite sous la garde, la demoiselle rejoint les jardins à l'horaire précise qu'on lui a demandé. La représentante de la Tradition et du Bushido se présente donc à l'illustre inconnu, une inclinaison du buste standard, les deux mains le long du corps sans tenir le sabre, la demoiselle semble tout de même aux aguets :

- Kakugyo-sama ? Je suis Setsuna Domotaï, vous avez demandé un entretien avec moi sans pour autant donner vos raisons ni vos motivations. J'aimerais désormais les connaître.

Tout ça reste louche, mais la bonne foi de la duelliste de venir à ce rendez-vous prouve tout de même qu'elle ne met pas tous les membres de la division dans le même panier. Ce n'est pas parce qu'un membre a tenté d'assassiner un des siens qu'ils sont tous comme ça. Kyoka est le parfait exemple que des gens bien se trouvent chez le Troisième Oeil.

Cependant, une chose commence à lui occuper l'esprit en voyant le curieux personnage devant elle, une peau anormalement blanche, ces lèvres rouge sang, certes il ne faut pas juger sur les apparences mais parfois il faut avouer que ça aide à mettre en confiance. Et l'aspect patibulaire de l'Impassible ne semble pas vraiment aider à installer une atmosphère saine et détendue.

 

Vierge de Bataille rejoint Impassible. Le serpent mire la pomme. Sourcil arqué, la femme feint l’ignorance quant à sa présence. Protocolaire, malgré l’évidence des propos antérieurs, le lien n’est pas fait. Je n’en attendais pas moins d’un adepte du Bushido ; l’intellect et la vivacité d’esprit ne sont pas les principaux traits qui ressortent des maîtres-lames.

Seppuku et décapitation prennent sens.

Cigarette tirée hors du paquet. Inutile de se confondre en une pléthore de particules honorifiques. Tranché-je. Je viens en paix. Rictus malicieux étire la courbure de cette fossette creusée. Le Garde des Sceaux est contacté. Bientôt, nos deux Divisions trancheront sur le sort de ceux qui tentèrent et tentent encore de déstabiliser le Goteijutai. Mort aux traîtres.

Première bouffée cathartique recrachée, je n’offre aucune seconde supplémentaire à ma consoeur.

Jouons franc jeu vous et moi ; votre réputation vous honore. Vous, Setsuna Domotaï. Vierge de Bataille. Allégorie du Bushido. Égide de la morale et de l’éthique de nos Pères. Premier pas effectué en sa direction, distance dévorée. Le Sotaicho doit sortir de vos entrailles, celles de l’Ordre Mnémonique. Comptez la Sanbantai derrière vous. Votre position rapprochée avec le Concile Blanc, permet un ruissellement du pouvoir sain ; nul barbare n’héritera de ce poste. Cigarette calcinée, quinte de toux réprimée. L’Humanité sera préservée.

Pas à pas, le criminologue s’enfonce dans le jardin Zen ; invitation implicite à la suivre. Messire Genichiro sera prévenu en temps et en heure, lors du sommet. Comptez cette information comme un gage de ma bonne foi. Borsalino, vissé sur le sommet du crâne, senestre, se pose sur l’Asauchi. Si vous doutez, mon Shikai a la particularité de discerner le mensonge de la vérité et la vérité du mensonge. Je me soumettrai à cette expérience. De plus, le point de rencontre, nullement neutre, indiquait une vérité inaltérable : l’agent ne souhaite aucun mal à l’Officier. Tout ce dont j’ai besoin, c’est de vérités. Vous êtes connus pour votre rigueur ; le péché du mensonge n’altère en rien votre myocarde.

Oeillade déportée sur les côtés : rien.

Heian s’arrête et se tourne vers la guerrière. Je ne peux me permettre d’engager ma Division derrière un Lieutenant dont j’ignore le comportement. Et ne peux faire front commun avec le banneret du Troisième-Oeil : les récentes exactions d’espions solitaires ont réduit nos chances de réussite à victoire à zéro. Nul ne peut triompher seul ; il serait idiot de chercher à mettre en avant la Sanbantai sans que celle-ci n’écrase la concurrence, faute de soutien.

Apprenez-m’en plus. En échange, je répondrai aux questions de votre choix. Cravate dénouée, le regard du limier vaut mille laïus : le sérieux est de mise. Voyez ça comme un troc entre deux Officiers cherchant à préserver le Nihon de ses propres maux. Répliqué-je aussitôt.

Le visage de Domotaï s'endurcit au fur et à mesure de la conversation, il s'agit là d'une véritable affaire interne pour l’élection du Sotaicho. Cependant, avec ses connaissances, elle sait très bien qu'il y a des risques que la corruption soit encore plus forte. C'est peut-être le moment de lâcher les informations sur ce Lieutenant un peu trop influent. L'air grave, la vierge de bataille accepte la proposition de balade de l'homme pale :

- Je vois, mettons dans ce cas de côté les courbettes pour venir à l'essentiel. Si la Garde des Sceaux et aussi dans la boucle, je pense que je peux tout de même m'exprimer librement sur la question.

D'un geste subtil ainsi qu'un regard, la demoiselle fait signe à son témoin oculaire de foutre le camp pour que personne ne puisse avoir une chance d'écouter cette conversation qui peut s'avérer capital pour l'avenir de l'Ordre Mnémonique.

- Je n'ai pas à remettre en doute votre bonne foi, je comprends que certains peuvent avoir un intérêt à mettre un membre de la septième division au sommet afin de garantir la sécurité et le respect des consignes données par le Concile Blanc. Cependant, je dois vous mettre en garde.

Soupirant un peu, la demoiselle regarde l'homme avec un sérieux qui pourrait faire glacer le sang à n'importe qui d'autre, mais l'impassible ne se laissera sans doute pas déstabiliser :

- Certaines personnes peuvent profiter de cette influence et dénaturer le Goteijutai plus qu'on ne le pense. Les mots dans l'ombre on énormément de pouvoir, vous qui appartenez au Troisième Oeil, vous devez le savoir mieux que quiconque.

Regardant à nouveau devant elle, son regard analyse la moindre parcelle du jardin pour vérifier que personne n'épie la conversation :

- Avant toute chose, je tiens à ce que je pourrais vous raconter doit rester le plus secret possible, je ne tiens pas à ce que l'honneur de l'Ordre soit plus entaché que ça. Si des têtes doivent tomber, ça ne devra pas être révélé publiquement pour les informations que je compte partager avec vous.

Plus de vingt ans qu'elle attend ce moment, est-ce enfin l'instant qu'il faut pour sortir les vieux démons et ouvrir une boîte de pandore ? Il est tout de même drôle de voir que les tensions apparentes entre les divisions respectives des deux protagonistes peuvent également être liées comme les doigts d'une main dans les coulisses.

- Ces informations, j'en suis en possession depuis très longtemps, mais mon grade ne me permet pas de pouvoir les exploiter. J'attendais à la base de devenir Lieutenant pour enfin pouvoir agir, un subordonné n'a pas à dénoncer un supérieur, n'est-ce pas ?

Une manière de faire comprendre qu'un des lieutenants de l'Ordre est plutôt pourrie jusqu'à la moelle et corrompu :

- Lettre et dossier sont en ma possession, mais je ne peux gagner seule, mes chances de réussite de nettoyer l'Ordre Mnémonique de ce fléau sont proche du néant. Pour cela que je n'ai pas agi jusqu'à présent, et que j'ai fait la rétention d'information. Mais si le Sotaicho doit être l'un des nôtres, alors je me dois d'agir, une personne corrompue ne peut être à une telle place.

Bien que la tentation de demander à voir le Shikai de l'officier Kakugyo, il fallait attendre le bon moment pour garantir la vérité sur la bonne question. Une carte qu'il ne vaut mieux pas jeter à la va-vite. Cependant, les dés sont maintenant jetés et un âge sombre pour la septième division risque de venir...
 

Vierge de Bataille se livre au serpent. Plusieurs gestes exécutés trahissent la présence d’un garde ; chose qu’il ne prend pas la peine de faire - étant venu seul et dénué de vile attention. Dévorée par les secrets, maîtresse du Bushido se révèle. Plusieurs tirades sont offertes sans que le criminologue ne réagisse. Stoïque, il entend les dires de l’Officier et est tout oreille.

Créature de sang-froid n’abaisse jamais sa garde, même face à somptueux butin. Les œillades perdues de la samouraï dénotent un certain stress, une certaine crainte. Voilà l’écueil du bushido : la prévisibilité. Une parole ne vaut rien. Terre-à-terre. Tout comme la confiance. Réaliste. Le Troisième-Oeil jouera son rôle dans l’ombre ; nuls griefs à votre encontre.

La guerrière se cache derrière une ribambelle de métaphores et de non-dits. En somme, d’après ce qu’elle avance, l’un de ses supérieurs entacherait sa Division - et par extension toute la Soul Society. Kichi Koshiro, le Fukutaicho qui représente l’Ordre Mnémonique. Déduction logique.. Épée de Damoclès tombe sur les desseins de l’enquêteur ; ses traits faciaux ne libèrent aucune piste.

En effet. Cigarette tirée hors de son paquet. Vous avez bien fait de ne rien révéler. Qui sait ce qui vous attend ? Défection ? Prison ? Assassinat ? Exécution... Le pouvoir en sa possession, aucune âme ne réchappe à un organe judiciaire dépendant. Ne révélez rien à vos confrères, votre vie et vos informations ne peuvent être perdues : les alliés se font rares lorsque l’on cherche à éradiquer la corruption. Péché majeur. Les valeurs se troquent bien vite au profit d’une position rassurante et d’un poste à hautes responsabilités.

Epoque damnée, à jamais corrompue. L'hybris de notre société hèle l'effondrement. Plaisir pervers qui me satisfait autant qu'il répugne l'opinion publique. Escamoter une vérité ne la rend pas moins vraie. Dans la vie, comme dans la mort, aucun compromis. 

Subordonné ou non, les racines de la noblesse se lient au Concile Blanc. D’aucuns peuvent jouir de certaines facilités administratives. Métaphore. Que contiennent vos lettres et dossiers ? Il m’est impossible d’engager mon département, ma Division, pour protéger des effets que nous ignorons. Franc. En tant que témoin, votre position peut basculer du jour au lendemain. Prenez garde.

Exhalation cathartique. Qu’attendez-vous de la Sanbantai ? Outre le fait de prendre ses responsabilités et de porter votre combat vers la lumière, tout en omettant votre nom pour ne craindre aucune représaille. Purger les corrompus. Une idée intéressante, sur le papier. Je vous écoute, dites moi tout.

Qu’importe l'issue finale de cette entrevue, le destin ne peut être altéré.

La parole ne vaut rien, en effet, sauf quand on a le bon grade et dans ce cas, nul besoin de preuves. Un pouvoir exécutif qui peut vite devenir gênant entre les mauvaises mains. Elle ne se fait pas vraiment de soucis pour que la division de l'ombre fasse bien son travail, c'est plus les méthodes qui vont être employées et la finalité de la chose. Observant cette manie de fumer encore et toujours ces cigarettes, la duelliste garde la main sous la garde son asauchi, droite et digne, elle fait tout de même preuve d'un grand calme malgré la situation.

- Je me rends bien compte des dangers qui guette si jamais ça vient à ce savoir, si la cible finit par découvrir qu'il est dans la ligne de mire de la troisième division. Il va forcément penser que c'est moi par contre, j'en ai aucun doute. Je n'ai rien révélé en trente ans, je ne compte pas le raconter sur tous les toits maintenant. Vous êtes le premier au courant de l'affaire.

Il reste officier, et malgré ses drôles de manières, que ce soit dans la tenue ou dans sa manière de parler, Domotaï ne doute pas une seconde que cet homme pourrait trahir ses intérêts. Mais Heian semble tout de même suspicieux que tout ça n'est pas juste un bruit de couloir. La belle demoiselle appuie donc ses propos :

- Les preuves irréfutables que cette personne a bien trop d'influence dans le concile, pour ses propres intérêts, il a réussi à faire affecter une âme dans sa propre division alors qu'elle était destinée à une autre. Des livres entiers de témoins de cette corruption malgré des initiales non tamponnés.

Son regard se pose ensuite sur l'homme, cherchant à déceler ses intentions ou une quelconque émotion. Être autant indifférent à la situation actuelle relève d'une maitrise de soi hors normes qui force l'admiration chez la samouraï.

- C'est un risque que je prends, mais je me dois de remplir mon devoir. Je n'attends pas spécialement grand-chose de la Sanbantai, le plus important. C'est que l'honneur de l'Ordre Mnémonique soit sauf, la chute d'une telle personne pourrait fragiliser notre cohésion, et une guerre intérieure serait la pire chose à avoir. Si cet homme doit tomber, il faut sans doute le faire d'une manière différente, le positionner en cas à part et indigne de la septième division. Pour que l'Ordre puisse éviter les jugements et la méfiance des autres divisions après une telle histoire. Je risque d'y perdre mon grade, ma vie même, mais si pour supprimer la corruption il doit en être ainsi, alors je remplirais ma fonction de pion sur l'échiquier.

Fataliste ? Ou réaliste ? Ça ne semble pas plus que ça déranger Domotaï de potentiellement finir en enfer. Telle est la voie du Bushido, remplir son devoir même si ça implique la mort.
 

Main gantée caresse menton pointu. La fin de la Soul Society ? Guerre civile tambourine à nos portes. Conspué et rejeté par ses neuf sœurs, l’Ordre Mnémonique perdrait son ascendance sur les autres Division. Un avenir bien peu radieux ; pylonne du San'in fragilisé à jamais par cette révélation. Dans les interstices de l'immaculée pyrée, le serpent veille.

Bien. Tranché-je. Une situation inédite. Je ne peux confier cette mission. Je veillerai personnellement au bon déroulement de cette destitution. Parole de serpent, main offerte pour sceller l’accord. Pacte avec le diable signé de son sang.

À situation extrême, réponse extrême.

Énarque corrompu, dites-vous. Loin de me surprendre. Tout dans Kyuutei transpire la corruption. Monde démoniaque où la folie humaine prend le pas sur le devoir d’encadrer une civilisation déviante. Soit. Le criminologue feint la réflexion ; solution toute trouvée.

Pour mon enquête - et votre propre sécurité - il me faut ces registres. Chaque information sera épluchée et retournée au centuple contre le haut-fonctionnaire corrompu. Sur un plateau d’argent, l’Impassible offre la tête de sa cible. Une vengeance en bonne et due forme.

La Nanabantai, pilier de notre société, ne peut tomber. Or, laisser ce Lieutenant atteindre la plus haute sphère de notre armée, ne jettera, sur les vôtres, que l’opprobre. Froide, la Sanbantai ne fait pas dans le sentimental. Nous nous entendons sur cela : une éjection dans l’ombre, sans que la moindre once de vérité ne soit perçue du grand public. Pas d’autres solutions que de s’abandonner au chien fou du Troisième-Oeil.

Rictus malicieux. Partez du postulat que nous nous sommes jamais vu ; nous nous reverrons plus jamais. Une assurance pour les deux Officiers. Autrement dit, vous abandonnez officiellement toute poursuite de cette enquête. Regard noir.

L’on ne peut vous ôter la vie si vous ne disposez plus des traces écrites : vous serez la seule à connaître celui qui détient les preuves. Comprenez-vous ? Malice d’enquêteur. Officieusement, rien ne vous empêchera de continuer, mais n'empiétez pas sur mon travail.

Deux cerveaux ne peuvent contrôler un même corps.

Regardant la main tendue, les yeux azur plongés dans ceux de l'impassible, elle semble perplexe face à ce marché. Les mains jointent devant son bas-ventre elle prend la parole :

- Je vais vous amener les documents, cependant, j'aimerais avoir la conscience tranquille grâce à votre Shikai à mon retour. Vous devez me garantir que tout ce que l'on vient de dire sera appliqué sans aucune interprétation douteuse. Le pire doit être évité...

Dans ce moment de tension, la belle se remémore de son amie Kyoka, si elle vient à être au courant de l'affaire, est-ce qu'elle va mal le prendre ? Que son amie et sa confidente lui a caché pendant tout ce temps cette sordide histoire.

Laissant ensuite son allié de fortune quelques instants, Domotaï ramène les fameux documents joint par une ficelle en faisant passer ça pour de simple papier administratif. Utilisant tout de même les couloirs les moins utilisés et des détours alambiqués, la duelliste ramène donc les documents en main propre.

- Voici ce dont vous avez besoin. J'attends maintenant la vérité et uniquement la vérité

Évidemment, ce qu'elle ne dit pas, c'est qu'elle s'est tout de même fait des copies depuis tout ce temps par acquis de conscience. Après pourquoi en faire ? Elle en a aucune idée, mais relire de temps à autre ces mots lui rappelle que son devoir est aussi de mettre hors d'état de nuire ce Lieutenant qui souille le nom de l'Ordre Mnémonique.

- Voici ma question : Que comptez vous faire exactement avec ces informations ?
 

La Vierge se perd dans une dissonance cognitive certaine ; à quoi bon dévoiler cette histoire, si derrière la samouraï se laisse happer par le doute ? Pourquoi douter de lui, maintenant, après l’avoir intimement lié à cette histoire. Ce non-sens dévoilé et amuse l’enquêteur. Un être bien peu fiable comme il s’en doutait. Seule la vermine se terre derrière un code de conduite excessif, prônant une moralité outrancière, injustifiée. Une façon de se mettre en avant, de prouver que l’on existe et que l’on sert à ce monde. Or, n’est-ce le comble du faible que de se dire puissant par la vertu ?

S’enfermer dans un carcan, dans un cercueil prématuré, voilà ce qu’est le Bushido et ce que le comportement de l’Officier corrobore. En tout point, le chien est soumis à son maître. N’est-ce pas lui qui l’a recueilli et nourri ? En quoi le canidé, ce meilleur ami de l’homme, est-il différent d’une âme belliciste vouant sa vie à une servitude décomplexée pour son maître adoré ? Se cacher derrière l’honneur et des duels sans saveur ne riment à rien. La Justice, pure et neutre, n’est masquée par aucun faux-semblant. Juste quand elle l’estime être, terrible quand elle le doit.

Aucun son ; acquiescement facial.

Le temps d’une cigarette, l’agent décentralisé de l’Ordre Mnémonique apporte son précieux trésor. Aucune confiance en son vis-à-vis, le Shikai est soumis à se dévoiler. Léger soupir. Index en guise de crochet, la cravate du croque-mort se desserre.  Senestre se pose sur le manche de l’Asauchi. Le regard du serpent se plonge dans celui du lapin.


Vif éclat lumineux. Katana devient faucille rouillée. Jihaku-zai a la capacité de générer un spectre immatériel lorsqu’une personne liée à moi ment. Pour nous lier, il suffit d’entendre cette phrase précédente. Enfin, mes mensonges génèrent également des spectres. Pouvoir latent libéré, contrat signé.Je vais illustrer mon propos et vous inviterai à en faire de même si vous ne me croyez toujours pas. Je compte voyager dans le Dangai. La lame recrache aussitôt une forme protéiforme noirâtre intangible : un spectre puissant - preuve du désintérêt complet de l’enquêteur pour le cosmos. Moi, Kakugyo Heian, Joukan du sous-axe Criminologie... Vérité proclamée. Je vais me servir de vos documents pour faire tomber, dans l’ombre et le secret le plus total, comme nous venons tout juste de le dire avant votre départ, ce Lieutenant corrompu qui bafoue l’Ordre, le Concile Blanc et par extension toute la Soul Society. Tranché-je, stoïque et d’une voix gutturale. Douter de ses capacités, de mes capacités, se ressent dans la vocalisation des froides notes que mes cordes vocales libèrent.

Une faucille aussi vierge que sa consoeur ; point d’apparition cauchemardesque.

Disposez vous d’autres documents, d’autres copies ? Puis-je, à mon tour, vous faire confiance ?

A défaut de serrer sa main, la paume s’ouvre, en attente des documents.

La vision de la faucille rouillé provoque chez la duelliste un réflexe qui lui fait attraper la poignée de son asauchi tout en tenant fermement le fourreau de son autre main. Quel est donc ce Shikai aux allures terrifiante ? Courageuse et fière, aucune peur ne se montre sur le visage de la guerrière, elle ne compte pas vaciller face à juste une prestation impressionnante.

Écoutant avec une grande attention les explications du Shikai d'Heian, la samouraï ne craint pas vraiment le contre-coup du mensonge puis qu'elle n'a pas l'habitude d'en faire. Si la vérité doit être caché, alors elle ne mentionne juste pas la chose, ce qu'elle a fait pendant toute ces années avec les informations désormais entre les mains de l'impassible.

Une fois les révélations et la conscience sereine, Domotaï salue humblement l'homme pour s'excuser. Le buste vers l'avant, ses doutes n'avaient visiblement pas lieu d'être :

- Navré de vous avoir obligé à faire ça, c'était déplacé, je n'avais en aucun cas le droit de remettre en cause votre parole.

Se redressant, la demoiselle se soumet donc au Shikai de l'impassible et répond honnêtement :

- J'ai en effet des copies manuscrites écrites par mes soins.

Elle a su garder le secret pendant trente ans, ça devrait suffire comme argument pour éloigner toutes suspicions de trahison. Cependant si l'homme pâle souhaite voir ces copies disparaître, elle ne fera pas de resistance et obéira, après tout, ce combat est aussi celui de la troisième division maintenant.
 

Le soubresaut mécanique de la samouraï anime la lippe du criminologue d’un rictus malicieux. Faucille rouillée, encore sanguinolente, offre une vision discordante de l’image attendue par l’éveil d’un Zanpakuto. Une arme qui n’est pas faite pour le combat - oxymore. Vierge de Bataille se complaît en excuse après s’être comportée comme une ronin.

Jihaku-zai se dévoile et le mensonge est chassé.

Assujettie à ce pouvoir aussi cryptique qu’ésotérique, la vérité s’empare de ses cordes vocales. La femme s’enfonce, sans même s’en rendre compte. Aucun spectre ne pénètre le Nihon, un signe de vérité. Senestre relâche son étreinte, la lame incurvée reprend ses traits d’Asauchi : il n’a aucune autre question à poser ou juger.

Aucune attention n’est portée à sa dérobade.

Dextre saisit les documents officiels. Gardez-les. Précieusement. Les copies manuscrites. Au cas où ma position est compromise. Un plan n’est jamais sans accroc. Qui sait ? Dans ce monde où le paraître est roi, les rumeurs circulent si vite… En outre, la présence d’une des ombres de la Sanbantai, en plein cœur du Kyuutei, ne peut qu’interpeller.

Tâchez de rester en vie, Vierge de Bataille.

Bottines martèlent le gravier ; volte-face effectuée. Désormais, la position du prétendant est entre mes mains. Jamais, le Concile Blanc ne laissera passer une telle exaction. Ordre Mnémonique ou non. Véritable pacte avec le démon, l’Impassible se fera une joie d’écraser la félonie en s’incarnant juge et bourreau.

La défection n’est point permise, qu’importe le rang.

Une organisation militaire telle que le Gotei 10 n’a pas le droit de s’effondrer sur lui-même. D’autant plus si la cause tient du complot risible. Si la Nanabantai occupe le rôle de ciment avec la Gobantai, dans l’ombre, le Troisième-Oeil est le véritable lien qui unit toutes les Divisions au pylône de San’in.

La carpe remonte le courant pour devenir Dragon.