Du jour au lendemain, sans prévenir, un battement de cœur. Douloureux. Peu importe où vous êtes, vous sentez le bout de vos doigts trembler. Vos yeux se dilater. Vous sentez votre corps chauffer, votre sang vous brûler… Un appel sans équivoque. Vous pesez le pour et le contre, si l’hésitation pouvait encore être un luxe à votre disposition, le sang noir dans vos veines n’arrêtait pourtant pas de vous pousser à l’acte. Dans le plus grand des secrets, vos pas vous amènent à Kyoto, mais votre sang continue de brûler. Des murmures vous guident, vous êtes attirés en-dehors des quartiers populaires de la ville, loin des murs, loin des regards…

Au milieu de nulle part, la certitude d’avoir trouvé une porte d’entrée cachée. Un pas supplémentaire, et vous voilà à l’intérieur d’une bulle spirituelle inconnue. Le ciel s’assombrit aussitôt, l’air devenant beaucoup plus lourd, alors qu’un immense château aux proportions improbables se dresse devant vous. Des oiseaux sombres volent dans ce ciel sans nuage, et pourtant si lugubre. Impossible de faire demi-tour à présent, un avenir incertain vous tendant les bras, tandis qu’une figure mystérieuse se présente à vous : un homme aux traits cachés, ses vêtements ainsi que son masque d’un blanc immaculé, dénotant avec le reste des lieux.


Sortis de votre transe, vous remarquez vous être retrouvé au même endroit, au même moment, Fenihara Shaporo et Yamaguchi Sakura. N’ayant pas d’autres choix que de suivre cet étrange personnage, vous accompagnez sa silhouette en restant sur vos gardes : les ombres dansent autour de vous. Les grandes portes s’ouvrent à vous, et c’est en traversant de longs couloirs qui vous sont inconnus que vous entendez une voix résonner à travers les lieux.


Une voix profonde et grave, faisant trembler vos os alors que les échos au milieu des couloirs font voyager une forme de pression spirituelle. Jamais dans vos vies n’avez vous désirez vous faire aussi petit… Mais la voix ne s’arrête pas là, tout comme vos pas continuent de vous guider dans une immense salle.


Arrivés devant de longs escaliers d’albâtre, la figure discrète qui vous servait de guide se tourne à vous, dans une pirouette exagérée, avant de vous inviter à monter les marches. Chaque pas devient de plus en plus lourd, mais la voix se fait de plus en plus claire.


Au sommet des escaliers se dresse devant vous une immense statue à l’effigie d’une divinité déchue, inconnue à vos yeux. Le simple fait de poser votre regard sur ses bords suffit à vous faire vaciller, comme si vous étiez attirés par cette sinistre pierre. Au pied de la statue, un trône carmin, un homme assit dessus. Devant lui, un groupe d’individus aux visages cachés, une longue robe sombre cachant leurs traits. Ne savant pas où vous placer, vous cherchez du regard le moindre indice, avant de remarquer les autres présences aux côtés de l’homme assit sur son trône. Chacun de vous reconnait son bienfaiteur, qui vous fait respectivement un signe très simple de vous avancer et de rejoindre le groupe d’individus, devant le trône.




En vous avançant, vous remarquez que vous descendez de deux petites marches, mettant ainsi les pieds sur un carrelage singulier alors que vous rejoignez les rangs, en silence. Le regard inquisiteur de la Grue à couronne rouge vous dévisage, gardant un visage impassible tandis que la femme vêtue de noire à ses côtés vous regarde à son tour, et continue d’annoncer la liste des prétendants… mais prétendants à quoi, au juste ?


Un long silence se suit, le Casoar de l’Armée des ombres reculant d’un pas tandis que le chef des lieux fermait les yeux. Il y avait tant à faire, tant à préparer, mais le danger guettait partout dans le Nihon… Une nouvelle fois, les rebelles vont plonger le pays dans le feu et le sang.



Êtes-vous prêts à vous engager dans cette intrigue sombre, mais juste ?

Un à un les Ilotes à en devenir prêtent serment, chacun y mettant les mots pour habiller leur promesse, leurs résolutions. La Grue à couronne rouge ouvre lentement les yeux, vous fixant directement les uns après les autres. Un regard intense, conséquence d’une longue vie, une ascension douloureuse mais juste jusqu’à ce trône où la prochaine étape de l’Humanité se joue. Les ombres autour de lui esquissent un sourire, notamment le Grand-duc qui semble dévorer à pleines dents cet instant, l’anticipation comme principale énergie pour alimenter son corps désuet. Enfin, Shinmen Akira lève lentement la main, attirant tous les regards.


Un claquement de doigts singulier, le son semblant résonner jusqu’à l’infini à l’intérieur de cette forteresse aux dimensions improbables, vous sentez votre gorge se resserrer alors que vous voyez des larmes de sang noir perler sur le visage de cette statue, cette divinité perdue. Depuis des orifices aux pieds du trône, une large quantité de liquide obscur s’échappe, descendant les marches à votre niveau et commencer à frôler vos pieds. Au bout de quelques secondes, c’est tout un bassin noir qui se forme autour de vous, le contact avec l’ichor produisant chez vous une myriade de sensations : comme au contact de l’eau chaude, vous sentez vos muscles se détendre et un profond réconfort vous saisir…



Jusqu’à ce que le Cauchemar commence.

Premier Impact : votre vision se brouille, et le décor autour de vous disparaît. Réaction brusque de tous ceux prisonniers du bassin, qui remarquent que le trône a disparu, ainsi que tous les spectateurs au rituel. Il ne reste que vous, jeunes pousses qui venaient à peine de prêter serment. Des grincements se font entendre, au loin, alors que vous vous sentez drainé, si tantôt le réconfort était réchauffant, vous avez plutôt la sensation de voir votre énergie disparaître. Paupières lourdes, vous avez du mal à vous tenir debout tandis que le dénommé Oishi Kinmochi tombe à plat ventre dans le sang noir. Vous clignez des yeux, un instant, et le corps a disparu. L’effroi vous caresse la nuque alors que vous redoutez quel genre de diablerie se dissimule dans cette eau si sombre.

Nouvelle sensation : la brûlure. Tantôt refroidis, désormais vous sentez vos veines se révulser avec l’impression d’avoir un feu liquide qui remonte depuis vos jambes, embrasant vos organes pour vous paralyser. Certains d’entre vous ne peuvent supporter la douleur et se mettent à hurler, tandis que le sang obscur remonte votre gorge. Un grognement bestial, indéchiffrable, déchire la toile de votre maigre résilience pour se jouer de votre esprit. Sakura, tu es en peine alors que tu as des flashes de cette bataille aquatique qui te reviennent, t’agressant autant mentalement que physiquement alors que le sang noir coule depuis le bout de tes doigts et tes oreilles. Tu n’entends plus rien, tu ne vois plus rien, tu ne ressens que douleur, un profond Mal se nichant en toi. Tu dois rester forte.



Quant à toi Shaporo, tu te sens pris au piège, ne pouvant lutter contre cette vague de ténèbres matérialisée à travers le sang du Vaincu. Ton corps précaire ainsi que ta résilience sont mis à rude épreuve, mais tu serres les dents. Le goût de l’ichor traverse tes lèvres alors qu’inconsciemment tu te sens appelé, levant lentement la tête vers le haut : tu croises les yeux illuminés de la statue divine. Des larmes de sang noir perlent sur ton visage, alors que tes yeux commencent à se révulser petit à petit. Tu sens attiré vers l’Ailleurs…




Une terre immaculée. Tu prends une grande inspiration, plus rien ne bloquant l’accès à tes poumons alors que tu sors d’une apnée interminable. Ton regard se perd vers l’infini qui t’entoure, remarquant des formes distinctes, mais qui se mélangent avec le reste car tout est blanc autour de toi. Les murs, le ciel, le sol. Tu es la seule chose qui dénote, dans cet environnement si pur, si proche de l’essence même de la création. Puis, depuis tes vêtements tâchés de sang, depuis les bords des plaques au sol, les fissures jusqu’alors invisibles à l’oeil nu, des gouttelettes de sang noir qui débutent une lente ascension, se dirigeant vers un ciel sans fin. C'est une véritable pluie inversée qui se forme autour de toi, lentement mais sûrement.

Tu n’as plus mal, tu ne te sens plus déchiré de l’intérieur, mais quelque chose cloche. Tu ne te souviens pas avoir vécu un tel moment dans ta vie, même en tant que Shinigami. Puis, tu remarques Sa présence, un peu plus loin. Un homme, un peu plus grand que toi, de dos. Ses longs cheveux platine flottent mystérieusement, comme emportés par la même magie qui transporte l’ichor et le maintient en suspension. Tu remarques entre Ses mèches baladeuses une couronne singulière, érodée, à l’origine d’un blanc pur mais qui est désormais rongé par des veines ténébreuses. Les conséquences de la Mort. En t’approchant, l’homme adresse un œil par-dessus son épaule, remarquant enfin ta présence. Il se tourne lentement, et avant même que tu ne puisses voir en détail son apparence, son visage, un voile sombre habille Ses traits, seuls ses yeux d’un rouge éclatant transpercent ce masque de ténèbres pour t’inspecter.




Sa voix est calme, mais tu te sens attiré par sa présence, alors que l’obscurité se répandait tout autour de lui. Une teinte rouge trouvait son chemin sur cette terre autrefois immaculée, désormais souillée. Tu supportes le regard de l’inconnu, sans pouvoir te détourner.



Il lève lentement les yeux, forçant ton regard à suivre le même cheminement que le sien, alors que tu observes le ciel changer de forme. Une pure imitation du ciel nuageux du Nihon, allant jusqu’à imiter la balafre qui donnait accès au Dangai.



À nouveau, vos regards se croisent alors qu’il tend lentement sa main. Tu sens une aura malveillante se dégager de tout son corps, comme si tu t’approchais d’eaux troubles, mais peut-être n’est-ce que le résultat d’une trop grande différence entre vos deux essences. Toi, mortel, et Lui, fragment du Divin.



Une main est tendue vers toi. La définition même du pacte avec le Diable. Quelle est ta décision ?

L’écho de ta voix traverse les environs mystérieux qui t’entourent, Shaporo, faisant légèrement trembler les nombreuses gouttes d’ichor qui se laissent emporter vers un ciel incertain. La créature tellurique t’observe, l’obscurité continuant de danser sur son visage alors que tu ne peux te détacher de son regard. Soudainement, la pluie se stoppe, tout le sang noir autour de vous reste en suspension, donnant cette impression d’être piégé au milieu d’une galaxie d’étoiles éteintes. Ta gorge se sèche alors que tu ne peux deviner les pensées qui traversent l’entité en face de toi, ne pouvant anticiper la réaction d’un être qui aurait vécu des millénaires, et qui clairement à un regard altéré sur la réalité par rapport à toi.

Que voit-il en toi ? Une opportunité ? Une ressource ? Un outil ? Tant de synonymes qui pourraient s’imposer à toi, tout comme tu peux éventuellement redouter la capacité du Roi Déchu à s’imposer sur toi et à te forcer à devenir son larbin. L’esprit pragmatique avancerait que si l’Impĕrātŏr était capable d’une telle chose, alors il l’aurait déjà réalisé ses plans à travers l’Armée des Ombres. Et pourtant, même cette réflexion ne peut totalement suffire d’argument pour t’empêcher de céder au doute, alors que les gouttelettes de sang se mettent à vibrer, en rythme. Un son étrange se dégage de cette réaction en chaîne, grattant les bords de ta conscience alors que tu te sens transpirer entre les doigts… Même si le Roi Déchu reste impassible en face de toi, la cacophonie qui se réalise autour de toi se traduit par un rire profond et malaisant.


Les vibrations s’adoucissent, l’air caressant délicatement ta peau alors que tu as l’impression d’être frôlé par la réflexion silencieuse de l’Exarchus. Des murmures, presque inaudibles, traversent la zone autour de toi. Un aller-retour incessant entre les différentes perles obscures qui gravitent. Enfin, une extension sombre s’extrait du tas de ténèbres qu’incarne Impĕrātŏr, une griffe noire venant à saisir ton avant-bras et une sensation vive de brûlure te paralysant de la tête au pied, t’arrachant ton souffle. Le voile sur le visage de l’Exarchus se déchire, laissant place pour la première fois à une expression sur ce que tu pourrais appeler visage : il est rempli d’une joie malice.


Petit à petit, la zone entière se met à trembler, un véritable tourbillon d’ichor se forme, l’Exarchus et toi dans l’oeil de la tempête. La pluie inversée, calme au départ, se laisse absorber par la tornade impétueuse qui menace de broyer quiconque ferait l’erreur de la traverser. Tu entends un puissant sifflement te traverser l’esprit alors que tu sens tes jambes te lâcher, retenu seulement par la main sombre qui te tient en place, le regard joueur d’Impĕrātŏr te fixant. Tu sens la peau de ton avant-bras être rongée, comme si une ouverture se créait pour faire de la place à quelque chose d’interdit.


Soudainement, le tourbillon d’ichor se déforme sous tes yeux, allant jusqu’à se diviser pour ensuite plonger directement dans ton bras. Ce que tu ressens dépasse le stade de douleur physique, c’est l’essence même de ton âme qui est chamboulée, les craquements de ta conscience se faisant sentir alors que tu tends vers la perte de connaissance. Mais la main d’Impĕrātŏr te tire vers lui, tes yeux faisant face aux siens alors que le sourire malaisant ne cesse de déchirer davantage le voile sur son visage.


La figure de l’Exarchus se fond avec les ténèbres, et tu te sens noyé dans un océan sans fond. Tu te sens remonter…


En sursaut, tu ouvres les yeux, Shaporo, alors que tu sens ton estomac retourné. Rapidement tu reconnais le carrelage singulier tant lequel tu baignais dans le sang noir, il y a quelques instants. Pourtant, il n’y avait plus aucune goutte autour de toi. Ni par terre, ni sur la statue représentant Impĕrātŏr, ni même sur tes vêtements. Tu lèves les yeux pour voir que la plupart des membres de l’Armée des Ombres n’ont pas bougé, mais lorsque ton regard se pose sur eux, tu sens quelque chose de plus. À la fois étrange, et familière. Comme si ton corps émettait un signal, et que chaque personne disposant du sang noir était capable de te le renvoyer, signifiant leur présence. Tu sens les battements de ton coeur, sous ta poitrine, alors que tu remarques la présence d’un homme près de toi. Il ne faisait pas partie des Ilotes comme toi qui venaient de prêter serment, non. Il émane une puissance tranquille, son regard froid se posant sur la jeune Shinigami que tu avais retrouvée par hasard en venant ici.

Tenant dans ses bras Sakura, Miugoki Sendo le Faucon, il la soulève délicatement avant d’adresser un regard en direction de Shinmen Akira.


La Grue à couronne rouge répond par un simple geste de la main, avant que le Faucon ne disparaisse comme une ombre. Il y a un autre à côté de toi, Shaporo, qui se relève lentement. Sa robe noire tombée au sol, tu vois ses longs cheveux noirs tomber en cascade sur ses épaules alors que ses yeux pourpres soutenir le regard de la femme qui avait annoncé les noms des candidats à l’épreuve. Kamoto Seihachi, de Shikoku, a lui aussi réussi l’épreuve. Enfin, tu as presque un sursaut lorsque tu remarques l’ombre devant toi, qui te dévisage avec un intérêt que tu ne peux deviner. Ton bienfaiteur, le Grand-Duc, ne semble contenir son anticipation alors qu’il te glisse une simple question, à travers un murmure que seul toi peut entendre :


Un instinct que tu ne sembles pas reconnaître te pousse à dissimuler ton bras droit, l’endroit où la griffe d’Impĕrātŏr s’est posée sur toi dans cette expérience mystérieuse et pourtant aussi réelle que l’homme en face de toi. Mais avant que tu ne puisses formuler la moindre réponse, la voix profonde du Daimyō de Kansai résonne dans la salle du trône.


Tu as beau chercher de tes yeux, tu ne trouves pas les cadavres de ceux qui ont échoué, ceux qui se sont écroulés dans le bassin d’ichor pendant le rituel. Tu ne peux qu’imaginer quel genre de sort était réservé aux corps et esprits les plus faibles.




Chaque bienfaiteur attribue un nom à son protégé, tandis que Shinmen Akira se lève de son trône, son regard alternant entre les deux Ilotes.



Le Milan Noir, cet homme mystérieux qui portait un masque aussi immaculé que ses vêtements, venait d’apparaître instantanément sous tes yeux, Shaporo. Tu ne l’as même pas senti venir, malgré tes sens affûtés, et malgré cette nouvelle capacité à ressentir le sang noir à proximité.



Un silence glacial s’impose alors que, doucement, tu sens ton corps réagir à la pression qui s’échappe du corps de l’Augure, son regard froid fixant le Milan Noir avant qu’il ne se tourne dans ta direction, sa main posée sur son fourreau.


Malgré le masque vissé sur le visage du Milan Noir, tu entends un léger rire alors qu’il tourne lentement son regard dans ta direction, une lueur étrange ancrée dans ses yeux profonds.