Dans l’optique de toujours pousser son corps dans ses retranchements les plus extrêmes, Kazuto a décidé de se rendre dans la région de Nemuro. Territoire hostile au possible, très peu de fréquentation. Il n’est pas question ici de concours de force mais uniquement d’endurance, pour une fois. De la course, principalement. Des jours durant, avec la fabrication de camps de fortune pour passer les nuits. Ou plutôt, reposer son corps et son esprit sans toutefois entrer complètement dans l’inconscience. Une habitude qu’il prend lors de ce genre de séjours de surpassement.

Cependant.

Qui dit bourgade isolée dit aussi incidents isolés. De passage près d’un petit village, l’agitation du coin attire son attention. Ce qui est un exploit en soi mais qui est aussi et surtout révélateur. C’est le bordel dans le coin, des humains sont menacés tandis que certains sont déjà morts. Prédateurs invisibles, modus operandi barbare. Le shinigami reconnait aisément cela, il s’agit d’une attaque de yokai.

Le devoir m'appelle. marmonne t-il d'une voix grave, légèrement agacé par cet imprévu.

Mais le temps presse. Sachant pertinemment qu’un démon a la capacité de transformer un humain en un congénère abject, il se doit de la faire disparaître au plus vite. Seulement… une fois arrivé sur place, c’est la débandade comme on dit : il n’y a pas moins d’une douzaine de monstres à l’oeuvre. Aussitôt alarmé par la situation, il envoie un papillon au quartier général le plus proche : celui de la neuvième division. Afin de rapidement prendre en main la chose, évidemment. Mais très certainement d’assurer l’après-sinistre.

Ses pieds le font progresser à grande vitesse dans le village. Il croise deux âmes viciées à qui il brise le masque et par extension le crâne. Voilà des yokai bien faibles. Mais suffisament puissant pour être nocif envers l’humanité. Et ce n’est qu’un début. Tandis qu’il brise les os d’une troisième abomination du mal, la terreur et l’incompréhension se répand au sein des rangs humains. Ces derniers accusant le coup de la divinité contraire à leurs croyances, pour ce qu’elles peuvent valoir.

Résumé:

Hokkaidō n'a décidemment rien d'une région paisible. Comment les émissaires de la neuvième division font-ils pour vivre dans des conditions aussi déplorables ? Les pauvres devraient vraiment se plaindre auprès du Concile Blanc et demander une relocalisation... Peut-être pourront-ils obtenir d'échanger leur QG avec une division moins utile, comme la troisième par exemple.

Quoi qu'il en soit, mon repos attendre. À peine ai-je eu le temps de terminer la mission qui consistait à mettre en déroute un yōkai de deuxième cercle de désolation que me voilà déjà réquisitionnée. Moi qui avait l'espoir de pouvoir passer un moment un peu plus calme au QG de la neuvième, je me trouve prise au dépourvu par un papillon noir qui réclame de l'aide.

Comme le village attaqué est sur ma route pour rentrer à Chūgoku, je me propose pour m'en occuper en premier lieu afin qu'ils n'aient à s'occuper que de la gestion nécessaire après un tel carnage. Une proposition qu'ils acceptent bien volontiers, me laissant partir devant le temps qu'ils s'organisent convenablement. Lorsqu'ils arriveront, nous auront ainsi déjà terminé le plus gros du boulot.

Il ne me faut, par chance, pas bien longtemps avant d'arriver sur les lieux. Le spectacle qui s'étale sous mes yeux lors de mon arrivée n'est pas des plus charmants : la déroute a déjà frappé les locaux. Les humains ne savent évidemment pas où donner de la tête ni comment réagir tandis que leurs frères tombent sous les assauts des créatures qui ravagent le village.

Pas le temps de niaiser, il faut agir ! Les humains ne cessent de s'agiter et de courir partout, et deviennent donc eux-mêmes leurs propres ennemis : en s'agitant ainsi, ils attirent d'autant plus l'attention des créatures démoniaques qui les assaillent. Tandis qu'un autre shinigami, sans aucun doute celui qui a lancé l'alerte, s'acharne à en purifier quelques uns, je fais pour ma part le choix de m'occuper de la sécurité des humains.

Le problème est que former un cordon de sécurité seule est loin d'être chose aisée. Surtout s'ils continuent à remuer ainsi, telles des fourmis qui courent dans tous les sens. Tant pis, il nous faudra compenser avec. Il ne faut pas bien longtemps avant qu'un premier yōkai ne s'attaque au groupe que je tente de protéger, puis un second.

Comme l'a sans doute déjà remarqué mon collègue un peu plus loin, ces bêtes ne représentent pas un grand danger pour des shinigamis. De simples coups chargés d'énergie spirituelle me permettent de m'en débarrasser sans encombre. Je reste cependant bien plus inquiète pour le sort des mortels que pour ma propre personne.

Parviendrons-nous à sauver les habitants du village perdu de cette attaque ? Rien n'est moins sûr...

Un renfort est arrivé plus rapidement que prévu. Et contrairement à Kazuto, l’arrivante garde en tête la priorité de sa mission d’émissaire : l’humanité avant tout. Un détail que l’explorateur a pour fâcheuse habitude d’éluder. Non pas par manque d’intérêt ou de professionnalisme mais plutôt car il se dit qu’un humain mort vivra mieux qu’un humain vivant. En tant qu’âme au sein de la Soul Society, quelqu’un risque moins et est possiblement éternel. Un paradis qu’il souhaite à chacun. Une vision des choses contradictoire par rapport à toutes les pensées présentes au sein du Goteijutai.

Mais il se doit d’agir contre son courant de pensée, car il n’est plus seul désormais.

Bakudo numéro quarante-neuf. en portant sa main à sa bouche. Landes désertes. Corbeaux agglutinés. il jette un regard froid à l’un des yokai. De mes arcanes jaillit la vie ; et la mort fuit. avant de mordre sa main.

La quasi totalité des entités sauvages se dirigent alors vers la cible en question afin de la dévorer. Une occasion que ne ratera point le shinigami. Tout en gardant en vue le spectacle macabre, il charge dedans en y assénant un coup de pied latéral aussi violent qu’à son habitude. Deux d’entre-eux sont découpés net et se débattent pitoyablement au sol avant de s’éteindre, de voir le reishi qui les constitue les emmener directement en Enfer.

En agrippant le masque de deux autres, il claque leur tête l’une contre l’autre. Ces dernières explosent et repeignent les environs très proches. Pas très reluisant, nous en conviendrons aisément. Mais bref. La suite n’est pas plus belle à voir : le yokai pris précédemment pour cible par le sortilège du Narusaka n’existe presque déjà plus. Et les deux démons restants ont profité du peu de moment passé hors du contrôle du shinigami afin de se repaître en s’affrontant.

Le résultat est sans appel : l’un deux annihile l’autre. Une scène qui rencontre les yeux indifférents de la chevelure de jais. Elle se tourne alors vers le dernier survivant, toujours en train de se remplir l’estomac. L’Officier lève la jambe devant lui. Tu me dégoûtes. Et son pied s’annonce être un marteau condamnateur pour la tête de sa proie. Mais toute proie ne se le reste pas forcément toute sa vie. L’énergie spirituelle de la bête se matérialise rapidement autour d’elle et son bras vient frapper l’épaule de son prédateur tout en l’esquivant. Kazuto décolle - à toute vitesse - en rebondissant plusieurs fois sur le sol (enneigé), avant de terminer sa folle course contre un iceberg flottant dans la mer près du village.

Un filet de sang coule le long de ses lèvres et il sent son bras être engourdi. Fort heureusement, la frappe a été moins compliquée à encaisser que prévu mais l’usage de ce membre va s’avérer être complexe. Et tout ça pour une raison bien évidente pour les deux dieux de la mort : le yokai vient d’évoluer. Sa forme va peut-être changer. Sa puissance, sa vitesse et sa polyvalence vont drastiquement augmenter. Ce séjour au sein de la province gelée se montre dorénavant plus intéressante que prévu.

Spoiler:

Tout se passe jusqu'ici pour le mieux. Les yōkai tombent fort heureusement les uns après les autres, tandis que que parviens plutôt bien à préserver les humains effrayés et leurs habitations. Les édifices qui composent le village sont en effet tout aussi importantes que les vies de ceux qui l'habitent : dans ces contrées où les hivers sont froids et rigoureux, tout perdre est un sort pire encore que la mort.

Le dernier yōkai qui a essayé de s'approcher d'un pauvre mortel a vite regretté son geste - bien que je ne sois même pas sûre qu'il en ait eu le temps. Je me rends d'ailleurs compte que mon comparse, un peu plus loin, partage en grande partie mon style de combat : pas de temps à perdre, faire dans la demi-mesure n'apporte rien de bon. Un problème doit être réglé et doit l'être rapidement, même s'il faut pour cela se salir un peu les mains.

Dans mon dos, l'autre entité spirituelle, dont je n'ai au passage pas la moindre idée de l'identité, fait usage d'un sortilège qui aura pour conséquence de pousser les quelques bêtes restantes à s'entredévorer. Une idée qui m'arrache un sourire malgré l'ironie de la situation : ceux qui se croyaient chasseurs sont bien vite devenus proies.

Et je ne croyais pas si bien dire. Il ne reste plus qu'un monstre, que le shinigamis qui a demandé des renforts s'apprête à exécuter, quand celui-ci décide soudain de mettre nos efforts à mal. Il se redresse, bien plus vif et puissant que prévu, et assène un violent coup à l'homme. Entre la puissance de l'assaut et le vol plané que celui-ci effectue, j'ai bien l'impression que l'autre shinigami y a laissé sa peau. Il va quoi qu'il en soit s'écraser plus loin.


Il est temps d'agir, je ne peux me permettre de garder une position défensive autour des villageois confus. Il faut se charger de cette immondice avant qu'il n'achève sa transformation. Dans le cas contraire, je n'aurai aucune chance, seule, contre une désolation de second cercle au sommet de sa puissance. Et nos efforts pour protéger ce petit hameau perdu risquent bien d'être réduits à néant.

Accumulant une partie de mon énergie spirituelle dans mes jambes, je file à vive allure en direction de l'anomalie. Je ne sais réellement me battre qu'au corps à corps, alors c'est quitte ou double. Si seulement j'avais eu le temps de me reposer un peu au QG de la neuvième division avant de devoir venir ici...

Arrivée à une distance satisfaisante de la bête, je lui envoie sans attendre ma jambe chargée d'énergie dans les pattes. J'ai décidé d'agir en deux temps : comme il a pu encaisser le coup de l'autre shinigami et y survivre, je décide d'abord de l'handicaper pour en faire une cible plus facile à abattre. Si j'arrive à lui arracher une patte, ses habilités au combat s'en verront largement diminuée.

Narusaka Kazuto se met doucement à rire comme un con, encastré dans son iceberg. Il est farouche, celui-ci. lâche t-il, ironiquement, avant de se dégager de la glace. Une main placée au-dessus de son front (geste inutile, il voit très bien), il aperçoit la suite des événements. De quoi est donc fait cette déesse de la mort qui a répondu à son appel ? Une constatation le frappe : elle a protégé un nombre impressionnant d’humains. Une seconde lui arrache un rictus : elle n’hésite pas. Sa jambe rencontre de la résistance dans la jambe du colosse avant que l’atrocité n’hurle à la mort : une de ses pattes vient d’être arrachée de manière sauvage.

Un spectacle étonnant qui ne durera qu’un temps. En effet, le membre qu’elle vient de perdre se régénère en puisant dans la glace aux alentours. L’élément se trouvant en abondance se concentrer sur le moignon et vient lui offrir une jambe parfaitement fonctionnelle et parfaitement gelée. Une arme à ajouter dans son arsenal. Merde, c’est quoi ça ? l’air surpris. Un puissant bond le propulse hors du bloc de glace, l’explosant au passage. Sa charge le ramène derrière la bête qui riposte contre la shinigami avec sa patte glacée et tranchante. Un violent coup de pied latéral et aérien visant la nuque de la bête, une esquive créé l'inattendu : le yokai savait qu’il arrivait. Comment ? Je te dégoûte ? Enfant de putain va. douée de parole, la création se venge doublement : toute la glace présente disparait sur une vingtaine de mètres autour d’eux. Cette région sera votre tombeau à vous deux. et une nova de froid brûlant explose, avec comme épicentre le démon.

Incapable d’esquiver en se trouvant dans les airs, l’Officier se retrouve prisonnier du grossier dôme de glace. Impossible de parler et d’agir. Evidemment, il n’est pas en reste et saura sortir de ce pétrin. Il commence déjà à s’agiter et fragiliser ce qui le retient… mais ce n’est pas assez. Un peu plus de temps. Ou de force. Ou les deux. Ce n’est pas maintenant qu’il sortira, en tout cas.

Spoiler:

Une jambe de glace, sérieusement ? Les yōkai d'Hokkaidō aiment vraiment trop l'élément du froid, c'est incroyable. Entre la grosse tortue et lui, je commence à saturer des démons capables de jeter un froid. Surtout lorsqu'ils m'attaquent avec un membre que je croyais avoir réussi à arracher pour les handicaper. Fort heureusement, il s'agit d'une offensive qu'un petit bond suffit à éviter. À l'inverse de la prochaine. Le yōkai a lui-même été capable d'éviter le coup de mon collègue qui se trouve pourtant dans son angle mort comme s'il s'y attendait. Et il ne tarde pas à riposter d'une manière fort inattendue. Sur une vingtaine de mètres ou peut-être un peu plus, la glace et la neige qui recouvraient le sol semblent se faire aspirer en direction de la créature fraîchement née.

En observant ce phénomène, je me doute que quelque chose de mauvais se trame. Un peu comme lorsque l'eau se retire avant qu'une vague gigantesque ne frappe le littoral. Je me jette donc à couvert derrière le premier obstacle qui pourrait me protéger un minimum, en l'occurrence une charrette qui appartient à l'un des villageois, tout en vérifiant si ces derniers sont hors de portée d'une attaque. Même si ça risque de ne rien changer, vu la distance qui me sépare d'eux. Et j'ai visiblement bien fait de m'abriter, parce que l'une de mes jambes qui n'était pas bien cachée se retrouve prise dans la glace. Je n'ose imaginer l'état de mon collègue qui était en plein vol à ce moment là. Le temps n'est cependant malheureusement pas à me soucier des autres. Je frappe ma jambe dans le sol dans l'espoir de briser le gel qui l'entoure, mais je ne parviens qu'à le craqueler et à me faire mal toute seule.

Pour couronner le tout, le yōkai, qui semble avoir compris que je suis celle des deux qui s'en est le mieux sorti, se rapproche de moi avec l'intention évidente d'en finir. Me redressant tant mal que mal sur ma guibole piégée et glissante, je fais face à la créature qui ne cesse de s'approcher. Je devine alors qu'il est plus à l'aise dans le combat rapproché, tout comme moi. Ce qui, je dois bien l'avouer, m'arrange : s'il s'était avéré que la créature pouvait se battre à distance, je n'aurais sûrement pas été capable de me mesurer à elle. S'ensuit alors un rapide échange de coups. Avec ma jambe ainsi bloquée, je ne suis pas très mobile, alors je décide de le projeter plus loin d'un violent coup au niveau du plexus. C'est le moment que choisit l'autre shinigami pour se libérer de son linceul de glace.


Je ne prends pas le temps de m'assurer qu'il va bien, nous n'avons pas de temps à perdre. Puisque notre adversaire semble être capable de se régénérer ou du moins de reformer ses membres avec de la glace, il n'y aucun intérêt à le blesser pour l'affaiblir petit à petit. Il faut donc l'achever de manière fulgurante, avant qu'il n'ait le temps de se soigner, et c'est ce que je compte bien faire ou fois que mon collègue se sera occupé de l'empêcher de se débattre. Sans même réellement me répondre, sans doute n'a-t-il pas encore totalement retrouvé ses esprits, le voilà qui se met à incanter une aria. Je ne suis absolument pas calée en Kidō et n'est donc pas la moindre idée de ce qu'il nous prépare, je décide donc de me tenir à distance du yōkai afin d'éviter de devenir un éventuel dommage collatéral.


Quelle aubaine, l'homme connait un sort de Bakudō ! Devant lui se forme un triangle dont les trois extrémités se replient pour former des pointes. Soudainement, la création file en direction de notre ennemi commun, qui se fait faucher de plein fouet. Sans doute les yōkai les plus jeunes n'ont-ils pas assez de connaissances du monde qui l'entourent pour connaître l'effet des différents sortilèges de Kidō. Quoi qu'il en soit, le monstre se fait projeter contre l'un des murs d'une maison humaine située non loin et s'y fait clouer sans pouvoir davantage bouger.

C'est donc à mon tour d'agir et de faire ma part du travail. Alors que je charge comme je peux en direction du démon piégé, la glace qui entourait ma jambe se brise enfin, me libérant et facilitant mes mouvements. Je fonce donc dans la direction du responsable de tout ce grabuge et, laissant mon énergie spirituelle infuser mon poing, porte un coup d'une violence inouïe en direction de sa caboche. De quoi lui briser le crâne contre le mur derrière lui et l'empêcher de se régénérer et donc de nuire.

Haletante, je m'écarte de quelques pas de l'engeance maléfique que nous venons d'achever, prenant appui contre un mur pour reprendre mon souffle et récupérer un peu. L'air de rien, défendre ce village n'aura pas été dans une mince affaire, et je devine que mon collègue et moi sommes tous deux dans un état pire que ce à quoi nous nous attendions en nous engageons dans une telle entreprise à deux.


Les humains vont bien, tout comme nous deux. Ils auront sûrement bien du mal à comprendre ce qui leur est arrivé, mais la plupart ont survécu et leurs habitations sont pour la plupart intactes. La vie au village ne devrait pas prendre trop de temps à revenir à la normale. Une bonne nouvelle et un constat rassurant qui marquent la fin de cette intervention d'urgence. Alors que je me retourne vers l'homme pour l'informer que tout va bien et que notre travail ici est terminé, je me rends compte qu'il a déjà quitté les lieux. Et que je connais toujours pas son nom. Dommage.