Chemin de croix arpenté par l’incarnation du glaive du Consent Nivéen. Sous la pluie battante d’un monde qui se morcèle, tu avances d’un pas impérieux en direction de ce bastion devenu refuge. Survivant de l’île de Sado, ce périple te rappelle amèrement ton retour après avoir occis le Boucher par l’implacable puissance de l’héritage des Pères Fondateurs. Une victoire en demi-teinte sans cesse recouverte par ce voile d’acrimonie qui rend ton existence malléable et tes émotions sinueuses. Le talion d’une Armée invisible avec la perte de tes frères. La quête d’information avec des révélations accablantes. Ton esprit vacille, vogue dans cet océan éternel de doutes. Sans l’appui inflexible du Concile Blanc, tu subirais de plein fouet ses affres que tu enfouies dans les abîmes de ton âme. Quel monstre deviendrais-tu si tout ceci devait resurgir en pleine lumière ? Tu n’oses poser tes pensées sur une telle idée, trop froide et sordide à ton goût.

Prunelle contemplant l’orée de cette citadelle invisible. Vent altier s’extirpant de ta cavité buccale. Enfin, tu es de retour chez toi. Une expédition haletante ne durant pourtant qu’un jour selon le référentiel commun, mais vécu comme une éternité pour celui qui plongea dans la gueule béante de l’insondable. La vue sublime de ce pilier surplombant l’Empyrée au loin annihila l’étreinte parcourant ce faciès tendu par ce qu’il venait de subir. Hélas pour ce mésencéphale bouillonnant, l’humble rôle d’abbé devait se poursuivre par delà l’essence de la mission. Restituer les faits dans leurs intégralités sans éluder la moindre parcelle. Tel est ton rôle d’avatar de la justice.

La Cour Impériale se fait silencieuse lors de ton entrée. Uniforme déchiré, visage obscurci, plaies encore ensanglantées. Les rétines inquisitrices te dévisagent de mille et une façons, mais le mutisme se cantonne à leurs lèvres. Personne n’ose questionner le Champion de l’Ordre. Personne n’ose remettre en question tes agissements au sein du Kyutei. Dans ta démarche assurée, tu rétorques d’un regard nimbé de colère cachant tes lamentations aux curieux qui lorgnent avec un peu trop d'insistance.

Ils ne peuvent pas comprendre.

Après un bref détour par ton bureau pour poser tes affaires, expérimenter cette malédiction du Kidô et examiner ce mystérieux objet ramassé dans l’antre de Premier Succès, tu te diriges sans attendre vers l’imposant albâtre toisant le firmament de sa grandeur. Une fois de plus, l’honneur t’appartient de passer ce pont écarlate, toi, l’Officier sans Nom au sang inconnu. Véritable anomalie parmi la noblesse, tu défies le lignage en incarnant le sigisbée des Régents de cette société. Pourtant, n’y a-t-il pas plus fervent défenseur de leur héritage que toi, celui qui a consacré son second souffle à apporter la lumière et la justice du consistoire sur cette armée invisible vacillante ? Le sang est une chose. Les actes en sont une autre.

Caressant du doigt ton rêve blasphématoire, tu t’approches d’une ombre blanchâtre comprenant bien promptement la raison de ta traversée. Profitant de la vue mirifique des jardins gorgés de vie, tes iris s’orientent bien vite vers l'anamnèse de monde dont tu es le gardien. Infaillible pilier d’un monde en proie aux désolations les plus abscons. Quand viendra le jour où Premier Succès le trouvera ? Seras-tu assez fort pour devenir l’égide du San’In, toi, le Favori ?

Masque d’abomination arboré, la seconde ombre pénètre de ton énergie spirituelle pour y sonder tes desseins et tes possessions. Une procédure habituelle et importante pour quiconque désirant pénétrer le sacro-saint sanctuaire. Les battants du San’In s’ouvrent enfin, te laissant, une fois de plus, observer la magnificence de l’antichambre du Concile aux dimensions titanesque et à la noblesse infinie.

Dernière étape atteinte. Ultime porte séparant l’héritier du Fukutaisho Rokkaku que tu incarnes et le Consent Nivéen. Respiration haletante, tu contemples le dernier gardien déployer toute la puissance de son être pour déplacer avec peine l’imposante porte hermétique. Enfin, tu avances d’un pas déterminé.

Rejoignant la passerelle suspendu au-dessus d’un gouffre au fond insondable, tu fais face à un hémicycle remplie par les édificateurs de monde invisible. Dominant ta personne de leur estrade, ils apparaissent comme Tout-Puissant, implacable, inébranlable. Cœur de l'amphithéâtre atteint, ton geste est immédiat. Soulevant l’auguste affiquet des dieux de la morts, tu déploies ta ferveur et ton genou dans une noble révérence, rare dans ce temps où l’Armée invisible se disperse.



Te relevant doucement, tu écoutes avec intentions les proposes de cette femme qui avait douté la veille. Rictus malicieux ; non pas que tu désirais cacher l’information du réveil, mais l'omniscience de tes dieux te rassura. Pourtant, tes sens s'agitent, une fois de plus. Parole s’extirpant de la gauche, tu observes à travers le voile les lèvres à peine discernables de ces membres qui agissent dans une harmonie irréaliste. Un détail qui ne t’avais pas échappé et que tu gardes enfoui dans ton esprit.



Ainsi débute le récit de l’éclosion d’une calamité sans précédente.









Arrêtant ta longue plaidoirie, tu sortis l’étui que tu avais récupéré dans cette pièce et que tu avais rapidement examiné pour le poser, à la vue de tous.



Te redressant, tu reprends.





Laissant le silence planer, tu reprends.







Tes yeux roulent vers le sol. Une information bien trop pesante sur ton esprit que tu peux enfin extraire.



Un instant de tristesse pouvait se lire dans tes yeux.

Ombre blafarde surgissant des ténèbres pour rejoindre le cœur de cette antichambre sacrée. L’intervention du gardien du péristyle se veut rapide, efficace, érodant en rien ton discours apodictique. Ponctué par le hochement de leurs silhouettes séraphiques, le consistoire t’écoute avec une grande attention, s’abreuvant du récit de tes mésaventures. Le silence se brise par la voix d’un homme te félicitant pour tes choix et le résultat de ta mission. Déclin inexorable de ta nuque, ta révérence se veut plus discrète, mais toujours aussi fervente.



Prunelles orientées vers l’assemblée pour capter l’essence de cette unité qui échappe à tes sens aiguisés. Entre fascination et tourments, tu laisses la main divine d’un des membres s’approcher de toi. Panser la plaie béante d’une entité inconnue. Une entreprise délicate, mais que tu ne remets en aucun cas en question. Une pulsation éthérée te traverse de part en part sans que tes réflexes ne puissent intervenir. Le vide te caractérisant se remplit, goutte par goutte, d’une étreinte chaleureuse, douce, suave. Baignant dans l'inépuisable puissance des Pères Fondateurs, ton corps se relâche, ton esprit se tempère. Un souffle s’extirpe de ta carcasse comme un soulagement inespéré. Grave est la voix qui t’aborde, bien loin de ton salvateur. Quelques jours suffiront à retrouver l’usage de l’hoirie des gens que tu contemples avec une admiration intarissable.



L’engeance démoniaque évoquée, tu te dois de rebondir pour transmettre une information qui intéressera très probablement le Concile.



Symbiose parfaite, tous reproduisent les mêmes mouvements sans aucun faux pas. Est-ce là le secret de cette entité si nébuleuse ? Une harmonie infaillible. Une fusion prodigieuse regroupant les shinigamis les plus talentueux pour les unir dans une entité angélique se manifestant par des avatars multiples ? Est-ce donc l’un des nombreux secrets de Concile terré au sein de cette tour d’ivoir ? Le temps des réponses arrive enfin.

Gestes et paroles s’entrecroisent dans l’hémicycle. Une confiance confiée à toi, le Sigisbée, champion de l’Ordre. Un honneur que seuls les Lieutenants de la Nanabantai possèdent. Assimiler et comprendre les rouages ensevelis de la genèse d’un monde dont tu es le gardien. L’assemblée te regarde avec insistance, se languissant de ta réponse. Un grand pas vers ton rêve de rejoindre ses Dieux parmi les dieux.



Un anathème destiné à tes pairs qui ne cessent de corrompre ce monde sans jamais essayer de le comprendre. Enfin, tu avais l’opportunité d’ouvrir les yeux.



Cette flamme inextinguible brûlant dans tes viscères se teinte d’un blanc immaculé, abreuvant ton corps d’une énergie pure. Dextre recroquevillée, la base de ton poing fracasse avec panache ton plexus bombé. Fier poitrail galvanisé par cet ultime engagement adjuré, ton exaltation nimbe tes propos d’une aura sérieuse, prête à porter le monde sur ses épaules.

Dans un silence monacal, tu observes sans vaciller le regard insistant de ses humains devenu dieux. Enfin, dans le souffle divin, ces êtres que tu adules te libèrent de cette lente et tourmentante agonie. Tu es prêt.

Les voix s’entrechoquent à travers l’hémicycle en plein essor. Tous prennent la parole à tour de rôle pour détailler la genèse de ce monde, de ton monde. Masque adamantin arboré, tu restes imperméable de faciès à toutes ses révélations levant le voile sur le mysticisme de cette société des âmes. Ton esprit bouillonne, décortiquant la moindre bribe d’information transmise par ce consistoire séraphique.

De nouveau, un silence. Le poids écrasant des regards se focalise sur ta pauvre âme tiraillée par toutes ces connaissances. Certaines étaient déjà acquises par les révélations du Joukan des Marches-Failles, mais tu en avais une confirmation irréfutable. Prenant quelques minutes pour organiser tes pensées, ta voix se fait enfin entendre.



Tes yeux balayent le chœur avant de reprendre.



Une relation venait de naître. Si tu devenais leur Favoris, il te fallait avoir le plus de cartes en main possible.



Très vite, tu rebondis, sur cet être, Valar. L’instigateur involontaire de tout ceci.



Nécromancie et contrôle des âmes. Un pouvoir effarant que les Pères Fondateurs transcendent, mais à quel prix ?



Une question ouverte où tu partages tes réflexions, sans accuser personne. Soudain, une fulgurance. Cette sempiternelle question te taraude.





Un poids qui se libère de ta poitrine. Enfin, tu peux extirper de cet esprit have ce qui te tracasse depuis de nombreuses semaines. Au-delà de tout cela, tu conçois leurs attributions



Ianmyar, l’envoyé du Dangai. Il avait déjà conscience de tout ceci. Premier Succès n’est pas



Un long soupir. Un silence. Tu attendais une réaction avant tout. Une proposition germée déjà dans ton esprit, mais tu devais prendre la température. En attendant, Il te fallait revenir à des affaires plus terre à terre.





Légère révérence. Une fois de plus, tes actes montreront que les Fondateurs ont misé sur le bon Champion.

Rétines rivées sur l’hémicycle en hauteur. Tu peines à accepter cette réalité qui se dessine devant toi. Toute ta vie de Shinigami, tu as imaginé dans le moindre détail cette ascension. Chaque ficelle immuable du temps s’est vue explorée et décortiquée par ton esprit quémandant la confiance des Fondateurs. Dans tes rêveries les plus nébuleuses, tu ne pouvais qu'effleurer du doigt ce désir blasphématoire d’atteindre le sommet de cette Armée Invisible. Pourtant, ce jour est arrivé. Toi, l’Officier sans nom, tu te tiens devant ces hommes et femmes capables de devancer les Exarchis et d’effrayer les divinités imposant leur dogme sur ce monde. Mieux que tout, tu n’es pas là pas en tant que pâle sous fifre, mais bien en tant que Favoris des patriarches édificateurs. Leurs confiances se déversent à travers toi par le biais de ces confidences réservées à l’élite.

Le torse bombé, la fierté de ton second souffle parcourt la moindre veine alimentant ce myocarde tari par les affres de cette élévation. Toutes ces pertes, toutes ces blessures, toutes ces morts… Elles ne seront pas vaines. Tu incarnes le vaisseau de ces vestiges effacés par l'implacable clepsydre. Tu possèdes maintenant le potentiel d’influer sur ce refuge et tu saisiras, de tes deux mains, cette opportunité.

Tes prunelles suivent inlassablement les échos et gestes du consistoire abreuvant ton mésencéphale des réponses qu’il adjure. Aucun point n’est ignoré et le Concile te répond, comme toujours, d’un concert subjuguant. Tu pensais intérieurement en demander trop, mais il n’en est rien. Un rictus gêné s’échappe de tes lèvres face à cette situation pittoresque. Tu es l’un des leurs maintenant. Le silence éternel de ces espaces infinis n’existe plus.



Valar, descendant de la Nuit brisant le cycle pour se retrouver dépassé par sa création. Un être, ô combien, intriguant que tu aimerais questionner, si le sort te l’accorde. Pourquoi le traître de la sorgue désirait-il si ardemment se désolidariser de son peuple ? Que gagnerait-il à se rallier aux Exarchis et former les humains dotés d’énergies ? Est-ce là l’explication de la création de Premier Succès ? La kyrielle des âmes menacée, une nouvelle entité se devait d’émerger pour rétablir l’équilibre ? Beaucoup trop de questions encore en suspens. Hélas, les Fondateurs ne détiennent pas toutes les clés de ce monde. C’est bien pour cela que tu iras t’enfoncer dans les limbes les plus obscurs pour dénicher les réponses et les rapporter à ceux qui t’ont permis de vivre, une seconde fois.



Alors que tu t’apprêtes à t’incliner, un sujet te frappe, redressant immédiatement ton corps.



Un léger silence, bien vite brisé par tes soins.



Une brève pause pour reprendre avec un visage plus sérieux.



Dents exhibées, tu hésites.



Dextre recroquevillé, tu dois extirper ce qui te trotte dans la tête depuis ton retour.



Un regard sérieux, bien plus que d’habitude, adressé aux fondateurs.



Balayant l’antichambre du regard, tu reprends d’une voix conquérante.

Prunelles inquisitrices observant le moindre mouvement effectué par les patriarches de ce refuge des âmes. Scruter sans relâche tes aïeuls pour extraire la bribe d’information la plus infime pour la décortiquer, l’analyser, la mettre à nue. Explorer les entrailles du pilier d’albâtre, une opportunité octroyée uniquement à quelques Elus que tu te dois d’ausculter avec minutie. Un devoir nécessaire pour appuyer au mieux ceux qui se sont défalqués de ses divinités impies.

Ainsi, les rictus de quelques membres de l’hémicycle n’échappe en rien à tes rétines observatrices. Sans réellement dompter tes sentiments dans cette antichambre du commandement sacré, tu arbores, toi aussi, un léger sourire en coin. Le sujet de la Yonbantai semble être le combustible ravivant le brasier inextinguible de l’Armée Invisible.

Sans dire un mot, tu écoutes inlassablement les réponses balayées à travers le péristyle. Sans surprise, les primordiaux surplombent la moindre de tes craintes par leur omniscience quasi absolue.



Main sur le cœur, tu exprimes simplement ton désir de vouloir toujours œuvrer pour le bien commun de la colonne nivéenne surplombant l’Empyrée.





Une révérence brève avant de diluer très rapidement tes dernières paroles.



Te relevant, tu abaisses légèrement la tête avant de reculer pour ne jamais tourner le dos aux protecteurs du libre arbitre. Les battants refermés, le chemin inverse s’offre à toi. Réponses accablantes et responsabilités alourdissent ta marche insonore jusqu’à rejoindre la Cour Impériale que tu dévisages d’un regard bien singulier. Un long soupire s’extirpe de ta cavité buccale alors que tu interpelles une recrue.



La jeune âme s’incline avant de commencer son périple, mais dans un rictus, tu lui fais signe de s’arrêter.


Les yeux écarquillés, la recrue reprend sa route dans le silence du Kyûtei. Tu es entré dans le San’in en tant que Champion de l’Ordre. Tu en sors en tant que Favoris du Concile Blanc.

Ainsi débute ton ascension.