Un pincement au cœur se fait sentir alors que tu fais tes premiers pas au sein du Seireitei. D’ordinaire, lorsque tu venais ici, c’était pour venir voir ta sœur, pour passer un peu de temps avec celle qui avait constitué, jusqu’à maintenant, une grande partie de ton monde. Ce qui n’était désormais plus d’actualité, chose difficile à assumer pour toi qui avait cru votre lien éternel, qui avait cru ne jamais pouvoir survivre à son départ, à son absence. Comme quoi tu t’étais trompée, parce que tu vivais encore, te noyant sous le travail pour passer outre la douleur que ses adieux avaient fait naître en toi. Comme aujourd’hui, où tu avais l’intention de te concentrer exclusivement sur ton travail plutôt que sur toutes les émotions négatives qui venaient te tordre l’estomac.  

Tu n’étais pas venue ici sans raison, pas pour le plaisir. Maintenant, comme avant, le plus loin tu te tenais d’ici, le mieux tu te portais, craignant presque à chaque fois croiser la route d’un membre de ta famille. Et peut-être même que tu aurais dû reprendre contact avec eux, envoyer une lettre à ton père pour discuter avec lui du projet que tu amenais jusqu’ici, après tout, n’était-il pas un lieutenant de l’Ordre Mnémonique ? Place qu’il avait réservé pour ta sœur. Un trône qui allait finalement être laissé vite.  

Oui, tu aurais pu. Et peut-être que tu aurais dû.
Mais tu préférais faire affaire avec un autre membre de la division, quelqu’un avec qui tu pourrais discuter sans tension ni animosité.

- Merci d’avoir accepté de me recevoir, Ryuzoji Genichiro. Avec un doux sourire adressé à l’homme, la main tendue vers lui. - Officier Kō Sana, du Consortium. Officier Ko. Tu en étais venue à l’assumer pleinement, ce nom qui t’avait tant empoisonné la vie, cette appartenance à la noblesse que tu avais décidé de fuir. Un nom qui aurait dû appartenir à la septième division, suivant les traces de ton père, aux côtés de ta sœur, alors que tu avais préféré partir, faire autre chose, suivre ce pour quoi ton cœur continuait de battre après plus d’un siècle d’existence. - Vous avez meilleure mine. Toujours en te montrant agréable, avec ce petit sourire poli, faisant référence à la dernière fois où votre route s’était croisée, lors de cette réunion aux conséquences finalement peut-être bien différentes que ce que l’organisateur aurait pu envisager.  

Des pas lourds et déterminés viennent chahuter le calme habituelle de la Cour Impériale. Théâtre de figuration emblématique, les plus aguerris se crispent face à cette agitation anormale provoquée par quelques recrues inquisitrices. L’instigateur d’un tel chaos ? Une question que les anciens de l’Ordre se pose sans cesse et la réponse revient encore et toujours telle la marée s’écrasant lourdement sur la roche provoquant son inéluctable érosion. Le Connaisseur comme il se fait appeler maintenant. La réponse à un pathétique désastre dans lequel l’Ordre se complait et prolifère. Une anomalie parmi les nobles désirant bousculer l’immuable par sa volonté inextinguible.

Les conséquences de la dernière réunion de l’Ordre embrument encore l’atmosphère, exaltée par ta prise de parole ferme et autoritaire. Tu avais rapidement éclipsé ton lieutenant résigné au silence face à toutes ces nouvelles accablantes. Cette place de chef d’orchestre improvisé te valut bien des émotions contraires de la part de tes pairs et ce que tu fomentes à la lumière de l’astre divin envenime un peu plus la situation.

Assis en tailleur, trancheuse d’âmes auprès de toi, tu ne vacilles pas lorsque les messes basses à ton encontre provoquent une cacophonie désagréable. Non loin de l’unique entrée de l’antichambre du Concile, tu t’exerces, encore et toujours à dépasser ta condition. Un chemin long et périlleux demandant une ferveur absolue. Les plus chevronnés reconnaissent tes tentatives de déployer ton reiatsu sur tout une zone pour accabler les êtres inférieurs ne pouvant lutter. Hélas, tu es encore bien loin de parvenir à une telle prouesse. Pourtant, tu exposes sans gêne les prémices d’un entraînement chronophage et énergivore à qui voudra poser son regard. Un ultime affront à ces gardiens de la bien-pensance voilant l’Ordre. Tel est le rôle que tu joues : l’instigateur du doute.

Le temps s’écoule amenant ton entrainement à sa fin temporaire. Les responsabilités d’officier prennent le dessus, t’amenant fatalement à ton bureau où la paperasse ne semble jamais s’arrêter. Un tri rapide suivi de la préparation d’un thé chaud pour préparer la prochaine entrevue. Une personne que tu avais déjà rencontré dans une situation chaotique tant sur le fond que sur la forme. Qui plus est, cette demoiselle porte un nom fort en signification au sein du Kyūtei. Une pensée que tu gardes pour toi, pour l’instant.

— Je vous en prie, prenez donc place. Puis-je vous servir du thé pour accompagner notre entrevue ?

Officier ? Voilà un détail qui avait évolué.

— Toutes mes félicitations pour votre nouveau grade, Joukan Kō.

Une légère inclinaison en guise de respect avant d’afficher un sourire en plaçant ta main sur ton ancienne blessure.

— Je me sens bien mieux que la dernière fois grâce, notamment, au Joukan Segata qui m’a suivi de très près. Je vous rassure, cette fois-ci, je resterai jusqu’au bout de notre réunion !

Un sourire léger suite à un petit peu d’autodérision innocente.

— En quoi puis-je vous être utile, Joukan Kō ?